Des cris. Les miens. Et du feu, surtout. J'essaie de fermer les yeux pour ne plus rien voir, mais la fumée me fait tousser, me rappelant que je ne suis rien face aux flammes. Ces dernières m'entourent, ne me lâchent plus.
Je tente de fuir. Je me trouve dans un gratte-ciel, ceux qu'on peux trouver dans chaque grande ville américaine. Je ne peux pas sauter, d'épaisses vitres m'en n'empêchent.
Le feu s'approche dangereusement, effleure mes mollets. Des vagues de douleur me submergent.Je serre  les dents pour ne pas voir couler les larmes qui menacent de sortir. Je dois être insensible à tout prix, et mourir digne. Je brûle littéralement.
On dira ce qu'on voudra, l'incinération est à mes yeux la pire forme de mort qui existe. Ma peau sent le roussi, elle commence à fondre. Et bientôt, ce sera le tour de ma chair. Et je serais de retour dans l'Autre Monde. Je baisse la tête, et essaie d'oublier les ravages des flammes sur mon corps. Je perds conscience. Plus rien ne peux plus m'affecter. Le monde où je suis tourbillonne de plus en plus vite autour de moi, pour finalement disparaître.

Mes yeux s'ouvrent, mon coeur bat encore à la chamade. Je ne suis plus dans un immeuble, mais bel et bien dans un endroit connu, chaud et réconfort. Mon lit.
Mes draps sont trempés de sueur, et j'ai un mal de tête épouvantable.  Un mauvais rêve, c'était juste un cauchemar...
Je me tourne sur le coté, allume mon téléphone portable. Je suis éblouie, des points noirs dansent devant mes yeux. Mes paupières se ferment, s'ouvrent, papillonent. Une fois le malaise dissipé, je peux enfin regarder l'heure qu'il est. 1h39 du matin... Pour une fois que j'avais prévu de dormir... je m'affale sur mon lit, essayant de retrouver le sommeil. Impossible, dès que je ferme les yeux, des images d'horreur envahissent mon cerveau.
Je me lève doucement, baille bruyamment, m'étire avec souplesse. Je me dirige vers la salle de bain afin de me passer un filet d'eau sur le visage.
Une fatigue si intense n'est pas normale. Je suppose que tuer me redonnera un peu de forces.
Je me dirige vers mon placard bourré de vêtements. N'allez pas croire que je suis une fashion-victim qui dépense tout son salaire à s'acheter toutes sortes de tenues. On m'en offre juste des échantillons, un avantage d'être mannequin.
Je me décide pour un Jean noir déchiré au niveau du genou et un débardeur, noir également. Je cache mon épée dans un grand sac de type sport.

Je sors de mon appartement en traînant un peu les pieds. La fatigue, quoi.
Je quitte le quartier résidentiel où j'habite pour finalement atteindre le Parc. Un sans-abri est là, avachi sur un banc. Il me regarde, se demandant sans doute ce qu'une si jolie jeune femme fait ici à cette heure avancée de la nuit.
Je m'approche de lui, sourire faussement gentil aux lèvres.
"Bonjour. Me ferez-vous l'honneur de faire un bout de chemin avec moi ? J'ai tellement peur de m'aventurer seule en direction des ruelles de la ville..."
D'habitude, je fais preuve d'un peu plus de délicatesse, mais bon, étant donné les circonstances, je n'éprouve en ce moment que l'envie de tuer sauvagement, sans m'amuser un peu avec ma victime au préalable.
Comme je l'avais prévu, il accepte. Je sais qu'il espère profiter des joies que pourraient lui offrir mon corps si parfait, mais il se met le doigt dans l'oeil jusqu'au coude pour que ça arrive vraiment.

Nous nous dirigeons vers la ruelle de l'inquiétude. Je lui ai dit que c'était là où j'habitais. Il me suit sans se poser de questions. Une proie facile.
Je lui montre l'usine désaffectée. Je lui souffle à l'oreille que je veux passer un peu de temps avec lui, et qu'ici nous serons tranquilles, sans personne pour nous déranger. Il accepte.
Je ferme la porte derrière nous, et m'avance vers lui, transformant peu à peu mon corps.
Il regarde avec étonnement mes cheveux noirs, mes yeux couleur nuit, mes lèvres rouges sang, mon visage transformé, paraissant plus dur, plus froid, plus dangereux, mon corps musclé et androgyne, mes cornes pointues, mes ailes déchirant mon débardeur, ma queue fouettant l'air, mes crocs assassins, mes griffes mortelles. Je ricane et empoigne ses épaules.
Ma force le surprend, il essaie de se dégager. Sans succès.
Je le lance à terre, il s'ouvre le bras. L'odeur du sang excite mes sens, je le prends par le cou, sentant son pouls entre mes doigts. Et j'appuie, déchirant sa carotide avec violence à l'aide de mes ongles longs et tranchants.
Il se vide de sa substance, inerte. Il est mort, ou presque. Ce n'est qu'une question de temps. Heureusement pour lui, il a eu une mort rapide, presque sans souffrance. Je n'avais pas très envie de m'amuser en cet instant.
Mes lèvres se collent sur sa plaie, aspirant le reste de son sang contenu dans son corps. Il n'est pas particulièrement délicieux, mais il fait l'affaire pour me nourrir.

Je lâche le corps, qui tombe avec un bruit sourd au sol, et déploie mes ailes.
Je m'élève lentement, jusqu'à atteindre une poutre miraculeusement dénuée de moisissure. L'odeur qui règne ici ne me dérange pas, j'ai déjà eu l'occasion de connaître bien pire au long de ma longue vie. Heureusement pour moi, ce n'est pas le cas de la plupart des habitants, qui évitent donc cet endroit comme la peste, me laissant donc tranquille pour un long moment.
Maintenant il ne me reste plus qu'à... trouver une occupation. Je déteste ne rien faire, j'ai toujours besoin d'être en mouvement. Et je m'ennuie vite, très vite.
Je me mets debout sur ma poutre, dominant l'usine, ou plutôt ce qu'il en reste, et admire mon territoire personnel de cette nuit.
Des outils, des murs tagués et retagués, des vieux cartons servant aujourd'hui d'abris à des bestioles en tout genre, un type allongé par terre, des...
Hein ? Mais... mais... POURQUOI il y a un type allongé par terre dans MON usine ?!
M'a-t'il vu ? Sans doute, étant donné le bruit que j'ai fait en tuant le clochard de tout à l'heure...
Je crie : " Hé toi ! Qu'est-ce que tu fiches ici ? "
Il doit être pétrifié de voir un démon sorti tout droit des histoires de peur lui adresser la parole. Je saute de mon perchoir, amortissant la chute avec mes ailes, atterissant en douceur au sol et me dirige vers lui.
" T'as pas peur de rester tout seul ici ?, j'ajoute avec un sourire sadique aux lèvres.
Je m'assois sur un vieux bidon rouillé d'un air nonchalant, regardant distraitement le cadavre que j'ai laissé traîner par terre. Un signe qui veut tout simplement dire : "Tu as vu ce que j'ai fait à ce bonhomme ? Je n'aurai aucun scrupule à te faire subir la même chose."

Je m'esclaffe bruyamment. Ce type est drôle, dans son genre. En fait, j'ai toujours apprécié ceux qui avaient du cran. Généralement, je ne les tue pas tout de suite. Généralement. Enfin bon, de toute manière j'ai déjà assassiné quelqu'un cette nuit, et je suis trop fatiguée pour recommencer. Quoique je suis certaine que je peux l'abattre sans effort. J'essayerai si l'envie soudaine m'en prend.
«Ce que je fais ici, c'est pas tes oignons. Et oui, si je squatte cette usine pourrie c'est pas pour le plaisir mais bien pour faire mes trucs tranquillement. Sans personne pour me déranger. Quoique pour cette dernière chose, c'est déjà visiblement trop tard... », je réponds sur le ton qu'il a lui-même utilisé.

Toujours assise sur mon bidon rouillé, je regarde mes griffes incurvées et tranchantes d'un air plutôt désinvolte. Même si j'apprécie en certaines occasions d'utiliser mon épée, j'aime d'autant plus blesser mes victimes à main nues. C'est plus amusant, un véritable corps à corps.
Cette pensée m'enthousiasme. J'ai envie de jouer un peu. Voyons si ce gars me suivra. En tant qu'allié, ou pas. Peu importe, tout me convient.
D'ailleurs, le voilà qui recommence à me poser des questions. J'aime bien quand les gens s'intéressent à moi. En même temps, comment pourrait-il en être autrement ? Je suis la belle, la magnifique, la surpuissante, l'unique Satania ! Tout le monde m'aime, même moi-même j'éprouve de l'admiration pour moi.

Je me lève d'un mouvement lent et souple, avant de le regarder.
«J'ai des ailes, oui. Ça te dérange, idiot ? Ah, et si tu penses que je suis une de ces stupides personnes qui étudient à cette école pour héros raté après avoir subi des mutations pour ressembler à un piaf, tu te fourres le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. Je ne suis pas humaine. Je suis bien plus que ça.», je lâche.
Afin d'accentuer mes propos, je m'approche de lui afin qu'il voie mon visage. Un visage d'une créature mythique venue d'autres lieux et d'autres époques. Pas laid, bien sûr.
Je sais que la plupart des personnes s'imaginent que les démons sont laids et répugnants. Mais c'est faux. Ils sont magnifiques, et je dis ça d'un point de vue objectif. Tellement, qu'ils en deviennent effrayants. Quoique ça peut tout aussi être à cette moue sadique et cruelle que nous affectionnons tous.

«Et pourquoi tu trouves que je ressemble à une flamme ? Parce que je suis dangereuse ?», je continue, la curiosité teintant ma voix.
J'avoue, lorsqu'il m'a dit ça, j'ai failli l'étriper. A cause de lui, j'ai entrevu pendant quelques instants le feu si terrible et effrayant au plus profond de mes pensées. Mais en me racontant ça, il avait presque l'air... admiratif. Et en y repensant, être comparée à quelque chose d'aussi horrible ne peut être que mélioratif pour moi. Même si j'aurais préféré oublier mes cauchemars de cette nuit, cauchemars qui sont d'ailleurs la cause de ma localisation dans ce coin malfamé de la ville.

Je m'approche du curieux. Je me demande juste à quoi il ressemble. S'il s'avère qu'il est plutôt pas mal, peut-être envisagerai-je de passer un peu de bon temps en sa compagnie. Quand j'aurai retrouvé la forme, bien sûr !
Je le regarde, yeux dans les yeux, avant de m'exclamer :
"Mais... tu n'es qu'un gosse ! Non, mais sérieusement, t'as quel âge ? "
Je souris, et rajoute, d'un ton faussement malheureux :
"Laisse-moi deviner... Tu es fâché avec Papa et Maman et tu as eu la merveilleuse idée de fuguer et de passer la nuit ici pour leur faire du soucis ?"
Ah, les jeunes d'aujourd'hui ! Heureusement, ou plutôt, malheureusement pour lui, il est tombé sur Tata Eva qui va très bien s'occuper de lui...

Je ne comprends pas vraiment pourquoi il rit quand je lui fais remarquer son âge. Bah, il doit sûrement avoir de légers problèmes psychologiques. A moins que ce ne soit la peur de me voir qui lui fasse cet effet. C'est assez amusant de voir à quel point je peux faire perdre la tête aux gens.
Sous forme démoniaque, comme sous forme humaine. Je me demande si j'ai déjà envoyé des personnes à l'asile. Bah sûrement. Si mes souvenirs sont bons, il me semble avoir conduit un jour une vieille femme au suicide après avoir assassiné toute sa famille et avoir déposé leur tête dans le congélateur. Elle a dû avoir une merveilleuse surprise en allant se chercher une glace. C'était assez amusant d'avoir pu découvrir en avant-première le corps pendu de ma locataire se balancer aux poutres du plafond de sa chambre. Et je suis certaine que j'arriverai à ramener très prochainement une pauvre petite personne à nouveau. Coco Lapin, par exemple, pour ne citer que lui. Rien qu'à voir la frousse que je lui ai refilé il y a deux-trois jours en le poursuivant déguisée en renard, je suis sûre que...
Enfin, bref. Je ne continuerai pas sur ce sujet ne me mettant pas vraiment en valeur. Et ne rigolez pas, je suis sûre que vous aussi vous aimez bien vous déguiser en animaux.
Revenons au gosse.

Ce n'est que lorsque je me moque de lui par rapport à ses parents que son hilarité cesse. Et là, Monsieur-je-me-prend-pour-un-enfant-maltraité commence à raconter sa vie. Je n'essaie même pas de réprimer un bâillement.
«Tes parents, je les comprend. Moi aussi je t'aurais vendu, à leur place, vu à quel point t'as l'air d'être chiant comme gosse. Et puis tu te trompes complétement. Je ne suis pas une mutation. Je suis ce que je suis, et ce que j'ai toujours été.», je rétorque avec ennui.
Bon, pour ce dernier point, j'avoue que c'est faux. Je n'ai pas toujours été un démon. Mais peu importe, le gamin n'a pas besoin de le savoir. Et de toute façon, je préfère garder pour moi mon ancien passé en tant qu'humaine. Je n'en ai encore jamais parlé à personne, et ce n'est pas à lui que je vais tout raconter.

Ah, bonheur, il a enfin l'air de se rendre compte que je me fiche totalement de sa petite vie. J'esquisse un petit sourire de contentement. Ah, apparemment le gosse, qui selon ses dires n'est pas si jeune qu'il en à l'air, a décidé de s'en prendre à moi maintenant.
Oh j'en tremble de peur. Pauvre abruti, tu as pensé à ce que je pourrais bien te faire, sérieusement ?
Tiens, juste pour ça, je vais te donner une petite leçon. Pour que tu aies un peu peur.

Je plaque le morveux au sol en plaçant mes deux mains sur ses épaules, et sourit largement, dévoilant mes crocs monstrueux :
«Mamie Gâteau, hein ? Je n'ai pas l'air d'être très âgée pourtant...
Et juste pour information, je ne tue pas que des vieux SDF dégueulasses. J'adore tuer des petits merdeux en ton genre. Amusant que tu te trouves sur ma route, non ?»
Je laisse le suspense régner. Vais-je lui arracher la tête, ou lui laisser quelques maigres instants de répit ? Le pire dans tout ça, c'est qu'il se croie blessant et cruel avec moi. Il rêve pour que je sois affectée par ses paroles.
...Bon, d'accord, j'avoue que sa comparaison à une grand-mère ne m'a pas laissée de marbre. Je n'ai pas de rides pourtant, non ?

Après quelques instants de domination et de combat de regard, je défais mon étreinte, et me relève.
J'époussette mes vêtements, quoiqu'ils sont tellement déchirés et maculés de sang qu'en enlever la poussière ne changera pas grand chose.
«Dis, je peux connaître ton petit nom ? C'est mieux de connaître le patronyme de sa victime, non ? », je finis par lui demander.
Je retourne vers le cadavre du sans-abri, et fixe son regard éteint. Ses yeux étaient assez agréables. Bleus délavés. Je lui en arrache un, et le tends au petit.
«T'en veux un ? Je suis d'humeur à partager aujourd'hui.»
N'attendant pas sa réponse, je prends l'autre œil sur le corps, et croque dedans à pleine dents.
Les yeux, c'est bon. Et je suis sûre que ça impressionnera le mioche.
Le liquide lacrimal et l'humeur aqueuse dégoulinant le long de mon menton, je demande, la bouche pleine :
«D'ailleurs, pourquoi tu squatte cette usine pourrie ? Un parc, c'est plus agréable, non ?»
En fait, je ne pose pas cette question par véritable intérêt, mais plutôt pour avoir des arguments afin de le virer de mon coin à moi.

Waouh. Si je m'y attendais... Non, je n'aurais jamais imaginé que le mioche irait arracher un œil de son plein gré sur le mort, pour ensuite le manger. C'est vrai qu'il avait l'air d'avoir faim. Je souris. Pas un sourire sadique ou hypocrite, mais bel et bien un sourire franc. Ce qui est quelque chose d'assez rare chez moi.
«Tu sais, je ne t'en aurai jamais cru capable. Bravo, même moi, à ton âge je ne l'aurai pas fait.», je murmure.
A son âge... oui, c'est vrai, lorsque j'étais une adolescente d'une quinzaine d'années, je n'aurais jamais pu faire ça. J'étais encore humaine à l'époque. Mais comme ce gosse, j'étais déjà seule, et c'est ce qui causa ma mort. Et plus tard, ma délivrance.
Mais là n'est pas l'heure de perdre la face devant le petiot.
«Enfin bon, moi au moins je n'ai pas été abandonnée ni vendue par mes parents !», je rajoute, sarcastique.
Parler d'un sujet qui fâche, la méthode infaillible pour faire oublier mes paroles pouvant me faire passer pour une faible.

Il commence alors à chanter et faire une petite danse étrange au lieu de me dire son nom. Charmant. Je lève un sourcil, assez incompréhensive. Le gosse a l'air de s'en apercevoir, puisqu'il s'arrête aussitôt, et s'excuse en prétextant la fatigue.  C'est ça... Je ne suis pas simple d'esprit, et je peux immédiatement affirmer que j'y suis pour quelque chose. Ça fait tout de même des siècles que j'effraie et brutalise des innocents pour connaître un minimum à quoi sont dues leurs réactions.
Le gamin précise ensuite qu'il aimerait aller dormir. Et ici même. Génial...
Il retourne ensuite s'allonger dans son vieux carton moisi, et ferme les yeux.  Il doit sûrement penser que je n'oserai rien lui faire. Mais c'est totalement faux. Il ne devrait pas s'opposer à moi ainsi. Il aurait même dû me vénérer pour l'avoir relâché précédemment au lieu de le tuer.

Sans aucun scrupule, je me baisse, approchant mon visage du sien. Et j'empoigne son col, l'attirant vers moi. Toujours accroupie, je lui effleure la joue de mes longs doigts blancs.
«Un visage si mignon et angélique... C'est vraiment dommage de l'abîmer...  Oh oui, vraiment dommage...»
Mes sens étant plus sensibles sous cette forme, je remarque rapidement quelque chose d'étrange. Des sortes de... fissures sur sa peau... C'est... quoi... ça ?...
Je le regarde fixement :
«Comment tu t'es fait ça ?...»
Mince, ce morveux va croire que je lui porte de l'attention.
Je m'empresse d'ajouter :
«Enfin, peu importe... Ce que je risque de te faire sera pire, bien pire...»

Par quoi pourrais-je bien commencer ? Je me sens lasse, autant utiliser mon arme.
Après un rapide «Reste là, je reviens.» adressé au petit, j'accours au lieu où j'ai laissé mon précieux sac de sport.
...Je l'avais bien laissé sur ma poutre, non ?...
Je m'élance, battant des ailes avec vigueur. Malheureusement, impossible de mettre la main dessus...
Après quelques instants, je redescend au sol. La perte de cette épée me serait vraiment insupportable... Un souvenir d'une époque lointaine, où j'avais appris l'escrime, me faisant passer pour un homme, aux alentours de la Révolution Française. J'y suis vraiment attachée. Une très bonne amie, qui m'a aidée à achever grand nombre de victimes.
Je suis sur le point d'être sujette à une panique plus ou moins intense, lorsque finalement je repère mon précieux bagage, juste à coté du corps que j'ai laissé en plan sur le sol.
Sortant mon coutelas de son fourreau, et l'exposant à la faible lumière de la lune éclairant l'usine, je m'approche à pas feutrés et souples de l'intrus.

«Dis-moi mon petit, je t'ai manqué ? Alors dis-moi, tu apprécies ma jolie rapière ? Mais ce n'est pas pour les enfants ça, on peut se faire mal, très mal avec... Tu veux que je te montre ?», je souffle, faussement apitoyée.
M'approchant lentement, je sens les muscles de mon visage se contracter en une moue sanguinaire. Mon corps ne réclame qu'une chose : tuer sauvagement...
Un faible courant d'air, passant sans doute grâce à une vieille bouche de ventilation, fait flotter mes cheveux noirs corbeau poisseux de sang, formant une espèce de couronne autour de ma tête et me donnant un air encore plus mystique, si c'était possible.
Mes cornes argentées brillent dans le noir et reflètent le dangereux éclat de ma lame.
Heureusement pour lui, aujourd'hui je ne suis pas assez en forme pour assassiner. Peut-être que s'il se montre convaincant, je l'épargnerai...
Mais dans tous les cas, ça s'avèrera très amusant pour moi.