Mes talons résonnaient dans les allées du vaste centre commerciales de la ville. Je flânais, m'attardant parfois sur la vitrine d'une boutique qui aurait attiré l'attention de l’accroc de shopping qui sommeillait en moi comme le bling bling attire la pie. C'était un mardi et il était 15h30, après vérification sur mon iPhone, que je rangeai ensuite dans mon sac noir et blanc Prada que je portai au bras droit. Comme en semaine je finissais tôt le mardi et que je ne donnais pas de leçons de piano ce jour-là, je profitais souvent du reste de l'après-midi pour sortir, avec d'autres amis ou en solitaire selon leurs disponibilités. En plus, les beaux jours commençaient à revenir, il fallait en profiter. En l’occurrence, cette fois-là, j'étais seule. Mes amis avec qui je me plaisais à me baladais étant occupés, pour une raison x ou y. L'avantage d'aller dans le centre commercial en semaine plutôt qu'en week end résidait dans le fait qu'il était nettement moins bondé. Certes, il y avait des gens, mais c'était vivable. J’appréciais fort peu quand les boutiques étaient trop remplies de gens, je préférai être un tant soit peu tranquille.

Je passais devant une bijouterie dont la vitrine me reflétait parfaitement. Je profitais pour jeter un bref regard afin de vérifier que tout était en ordre. Mes cheveux encadraient parfaitement mon visage, de ma main, je passai mes cheveux du côté droit derrière l'oreille afin de rendre plus visible la boucle d'oreille. Je les avais acheté récemment et il faut bien dire que je les trouvais particulièrement belles. Elle représentait deux chevaliers, avec armure, boucler, épée et petite moustache stylisée. Non vraiment, elle était classe, mais de D&G, c'était le moins que l'on pouvait s'attendre. Comme elles étaient assez grandes – ce qui dérangerait peut-être certains mais qu'importe ! –, je jugeai préférable de rester sobre pour le reste des accessoires et du maquillage. D'une part, pour ne pas ressembler à un sapin de Noël, d'autre part, pour mieux les mettre en valeur. Ainsi, en bijoux, en plus des boucles d'oreilles chevaliers et la bague en or gris à l'helix gauche, mais qui était caché par mes cheveux, je n'avais qu'une bague en or gris à l’effigie de la fameuse panthère Cartier à l'annulaire gauche. En maquillage, un peu d'eyeliner et une french aux ongles. Du reste de ma tenue, une veste officier noir de chez Zadig & Voltaire, avec un double t-shirt blanc Karl Lagerfeld – il y avait d'ailleurs des imprimés du célèbre styliste –, un slim bleu foncé D&G et des bottines en daim de chez Balmain. Z&V, D&G, Balmain, trois de mes marques préférées, n'ont pas pour la marque en elle-même, ça je m'en moquais, mais parce que j'aimais leurs collections. Quoi ? Parce que je suis nécromancienne, je serais condamnée à ne m'habiller qu'en gothique lolita uniquement ? La blague ! Je n'avais rien contre ce style, mais sur d'autres filles. Regarder les collections de bijoux de la boutique me rappela que c'était bientôt l'anniversaire d'une de mes amis restait en Angleterre, Emma. Bah, j'avais bien le temps !

Bon, soyons méthodiques et rigoureux, avant de se laisser aller, commençons par acheter ce pour quoi j'étais vu et on verra ensuite si je craque pour telle ou telle chose. Je me dirigeai donc vers une grande boutique culturelle sur deux étages. Je commençais par aller dans le rayon disquaire, je voulais le dernier album de Depeche Mode. Ce dernier pris, je regardai distraitement l'étalage, ah, le dernier Bowie aussi. J'avais bien aimé son dernier single. Petit tour vers le rayon pop, ma foi, j'avais déjà les derniers albums de Rihanna et autre Xtina. Je regardai néanmoins les nouveautés dans les différents rayons, prenant des albums dont je trouvais les pochettes attirantes et notant parfois sur l'application bloc-note de mon iPhone quelques artistes à essayer.

Depeche Mode et Bowie en main, j'allais maintenant vers le coin livre. Plus exactement vers le coin pratique, vous savez le genre truc pour apprendre à tricoter, ou comment faire ci ou ça. En ce qui me concerne, je cherchais un livre de cuisine pour débutant. Je sais, je vais briser le mythe, mais non, toutes les filles ne savent pas cuisiner, surtout quand elles n'ont jamais appris. Pire, quand elles n'ont jamais eu besoin d'apprendre ! Au manoir, c'était la cuisinière attitrée qui nous faisait les repas, parfois aidée du majordome. Alors, certes, je savais me sustenter, genre faire cuire des spaghettis, ça je maîtrisais, mais bon, ce n'était pas cuisiner ça... Si bien que le plus souvent, soit j'allais aux restaurants, soit je me faisais livrer. Mais bon, j'avais quand même envie de me débrouiller un peu mieux toute seule. Alors, oui, j'avais bien envoyé des mails de temps en temps à Julie, la cuisinière donc, mais je n'allai pas l'embêter tous les quatre matins non plus ! J’attrapai un livre de pâtisserie, je jetai un coup dans le sommaire pour voir s'il y avait la recette du parfait à la fraise, mon pêché mignon. Oui, hop j'allai à la page et... bon sang, ça semblait être d'un compliqué ! Je reposai le livre dans une petite moue agacé et en soupirant. Je regardai le reste de l'étalage, ah, Débuter la cuisine par Alfred Lock, grand cuisinier de Los Angeles disait le petit autocollant. Bon, pourquoi pas. Je me mis à feuilleter les pages.  

Alors, alors, que me proposait ce bouquin ? Après avoir feuilleté quelques pages au hasard et salivé intérieurement devants les belles et appétissantes images, je jetai un coup d’œil au sommaire. Bon, commençons par les entrées. Œuf mimosa, ah, c'est sympa ça. Page 13. J'allai à la page et regardai la recette. Pour quatre personnes, il fallait donc d'après le livre, six gros œufs extra-frais, deux cuillères de mayonnaise, du sel, du poivre voire du persil haché. Après ébullition de l'eau, mettre les œufs 10 minutes. Ceci fait, les mettre dans de l'eau fraîche puis les écaler, avant de les couper en deux et récupérer le jaune en prenant soin de ne pas abîmer le blanc. Le jaune récupéré, l'écraser dans une passoire étamine ou utiliser un tamis, mélanger avec la mayonnaise – tout en gardant un peu de jaune – et ajouter sel, poivre et persil. La mixture obtenue, en remplir le blanc, soit avec une cuillère en bombant, soit avec une poche à douille. Enfin, saupoudrer du jaune restant et du persil. Le bouquin disait qu'on pouvait aussi ajouter du thon, selon nos goûts. La recette était simple, il fallait que j'essaye. Ce n'était pas de « grande » cuisine, je m'en sortirai assurément. Enfin, gageons !

Je n'eus pas le temps de regarder plus en détail d'autres recettes que l'on m'apostropha d'un « excusez-moi, mademoiselle ». La voix était féminine, mais plutôt jeune. Chose qui me parut décalé par rapport au vouvoiement et au « mademoiselle ». Je détournai aussitôt mon regard du livre de recette pour regarder celle qui me demandait de me décaler. En effet, la fille qui était à côté de moi était jeune, elle devait avoir dans mes âges, si elle était plus vieille, cela ne devait pas être de plus de deux ou trois ans. « Au temps pour moi » lui répondis-je avant de jeter un œil à l'allée du rayon et de reprendre « en effet, vu la taille de cette allée, je ne devrai pas stationner trop longtemps ». Ceci fut dit en même temps que je fis quelques pas pour me mettre de l'autre côté de la jeune fille afin de la laisser accéder au rayon du haut. Ainsi, elle put accéder aux livres qu'elle voulait. Je lui offris un bref sourire en guise d'excuse, tout en refermant d'une main le livre de recette de cet Alfred Lock. Ma foi, je comptais le prendre. Je regardai distraitement le reste du rayon pendant que la brune à côté prenait un livre sur la confection de smoothies. C'est vrai que c'est bon ces petites choses ! Mais ne nous égarons pas avant, d'apprendre à faire des boissons, on allait déjà apprendre à se nourrir hein ! Ce serait particulièrement pertinent.

J'étais perplexe. Le visage de la fille me semblait familier, un peu comme si je la croisais régulièrement, mais sans jamais la voir réellement. Jusqu'à cette fois là, bien sûr. Ceci n'avait rien de bien extraordinaire, la ville était grande, il était possible que l'on se croise de temps en temps. Ne serait-ce que dans le bus ou le tram par exemple. Hum, peut-être pas dans les moyens de transport non, en général, j'ai mes écouteurs aux oreilles et fais abstraction de ce qui m'entoure, pour sûr que je ne reconnaîtrais jamais une personne dans ce cas-là. Je pris un livre un peu au hasard, regardai vaguement le résumé au dos, tout en continuant de réfléchir. Peut-être une personne de l'entourage d'un de mes « élèves » de piano ? C'était déjà plus probable, en donnant des cours à domicile, il arrivait souvent que je croise les membres de la famille de la personne à qui je donnais des leçons. Non. Cette coupe de cheveux, ce style vestimentaire – très bon dit en passant, elle aimait le bleu visiblement –, cette allure... Ah ! Elle était pas à la Heroe's elle aussi ?

Comme je sentais que cela me turlupinerait et que je ne serais pas en paix si je ne résolvais pas ce mystère, je décidai d'engager la conversation. « À mon tour de vous apostropher » commençai-je dans un sourire courtois « mais votre visage m'est familier, c'est terrible ! » continuai-je et bon sang, que le vouvoiement pour une personne du même âge est peu naturel ! « Vous ne seriez pas à la Heroe's par hasard ? » Voilà, c'était demandé. Restait plus à espérer que je ne me trompe, sinon, j'allai passer pour une andouille.

Son attitude était légèrement méfiante, il faut dire que c'était plutôt logique comme réaction et cela ne m'étonnait pas. Moi-même j'appréciai guère être apostrophée par des inconnus, que ce soit dans la rue ou ailleurs. Le pire reste la lourdeur de certains garçons qui courroucés qu'on ne soit pas d'avis de partager notre numéro, vous lâchent un « salope » avant de partir. Parce que forcément, toutes filles n'aimant pas se faire draguer de la sorte et ne se laissant pas faire est une salope, c'est bien connu. Et n'oublions pas ceux qui sortent tout droit des années 80 et pour toute approche vous sortent un « vous ah bitez encore chez vos parents ? » Grand moment où vous êtes partagé entre l'envie de rire ou de fuir.

Cependant, le visage de la jeune fille m'était trop familier pour que je la laisse filer sans filer sans en avoir le cœur net. Gageons qu'elle ne m'en veuille pas. Au moins, bien que sur la défensive, elle se retourna, elle aurait aussi bien pu m'ignorer, c'était toujours ça de pris. Et puis, vint le moment de la réponse. Avais-je vu juste ou m'étais-je fourvoyé ? Chose qui me ferait passer pour la première des andouilles dans un grand moment de solitude. Remarque, si je me trompais et que je ne le voyais plus ensuite, ce n'était pas bien grave non plus. Bref.

Mais ma foi, j'avais raison, elle étudiait bien à la Heroe's tout comme moi. Je ne déraillais donc pas, c'était toujours bon à savoir. « Je me disais bien aussi que votre visage m'était familier » répondis dans un sourire bienveillant. Maintenant, la question restait de savoir qui elle était. Parce qu'à la rigueur, des gens de l'Heroe's, ce n'était pas ce qui manquait en ville, surtout dans un lieu comme le centre commercial. Je passai distraitement ma main libre dans mes cheveux pour les caler derrière mon oreille gauche. Non, non, quelque chose avait dû me marquer chez elle.

Et puis, le flash. Mais oui, cette chevelure, cette allure et surtout, cette robe ! Je claquai des doigts dans un sourire de celle qui venait d'élucider le secret d'un des plus grands mystères du monde. « Miléna, c'est bien ça ? Il y a quelques semaines, un mec de ma classe a tenté une approche dans le parc de la Heroe's, mes amis et moi étions posés sur un banc pas très loin, tu avais cette robe – qui est très jolie d'ailleurs. » Remarquant que je l'avais tutoyé, j'ajoutai : « J'espère que cela ne t'ennuie pas que je te tutoie ? » Avant de poursuivre « En tout cas, la scène était plutôt cocasse à regarder. Surtout la tête qu'il a fait quand tu l'as rembarré. » Ahlala, sacré John, un jour il faudra qu'il comprenne que le genre tombeur sexiste des 60's est de nos jours dépassé, et de surcroît, pénible.

« Moi, c'est Tara » lui dis-je dans un sourire aimable.

Je le revoyais encore, 10 minutes avant la tentative à la cafet'. « Les filles, j'ai une cible. » Ce à quoi je répondis « Faut-il applaudir ? » après qu'une de mes amies ait lancé, blasée « Encore ? » « Et peut-on savoir l'heureuse élue ? » s'enquit une autre amie. Après un sourire qui se voulait de crooner, il finit par lâcher le morceau. Une certaine Miléna Di Marzo. Je fis une bouche à l'envers, ce nom ne me disait rien. Je regardai l'assemblée qui ne semblait pas non plus la connaître plus que moi. Inconnue au bataillon la demoiselle, mais nous la plaignions déjà. Devant nos mines perplexes et jugeant sûrement que nous étions très intéressées d'en apprendre plus, il se sentit obligé de nous expliciter la manière dont il avait eu connaissance de cette fille.

Oui John, on se souvenait que tu as un ami dans une autre classe. Non, on ne se souvenait plus de son prénom, mais on s'en moquait tu sais. Je soupirai et portai mon attention sur mon thé. Après cette introduction aussi passionnante qu'inutile, il finit par nous apprendre qu'une fille avait dit son pote que la fameuse Miléna était une, je cite, « nympho ». C'est tout ? Remboursez ! J'avais osé espérer qu'il y avait déjà eu un premier contact. En général, quand il venait se vanter, c'est qu'il était sûr d'amener la fille sous sa couette, ou ailleurs. Et là, il se basait juste sur une vague rumeur dit pas une fille qu'il ne connaissait ni d’Ève ni d'Adam ? Il me décevait un peu quand même, j'étais partagé entre l'envie de rire ou de lever les yeux au ciel. Moi qui pensais pouvoir me mettre quelque chose sous la dent, c'était râpé. Cela dit, après avoir mis la moitié des filles de la classe dans son lit et s'être fait rembarré par l'autre moitié, il était bien obligé d'aller chasser ailleurs.

« Et que comptes-tu faire ? » J'avais peur de la réponse, mais j'étais aussi curieuse. Ah, ce brave ami lui avait même donné l'emploi du temps de leur classe, quelle délicate attention ! Il nous proposait d'attendre la demoiselle dans le parc et il l’accosterait alors qu'elle se rendrait en cours. « On ne raterait ça pour rien au monde ! » s'exclama une amie en riant. Oh que oui ! Je finis mon thé et nous voilà partis. Mes amies et moi nous posâmes sur un banc pour papoter, tandis que John était plus loin, afin que Miléna ne remarque pas qu'il partait de notre groupe. Même si nos volontés n'étaient pas les mêmes, nous approuvâmes tous cette stratégie. Lui voulait ne pas donner l'impression d'être un gars timide poussé par une bande filles, parce que paraît-il que c'est dévalorisant, quant à nous, nous ne voulions surtout pas que la fille imagine que ce plan venait de nous. Surtout si ça foirait, on ne voulait pas que ça nous retombe dessus. Nous avons eu raison, pour foirer, ça avait magistralement foiré ! « Allons, c'est pas grave John, on en rigolera dans vingt ans » lui avais-je dis plus tard dans l'après-midi, alors qu'il était courroucé que la fille ait refusé. Enfin, mes amies et moi, nous en rigolions déjà.

J'haussée un sourcil, étonnée. Pourquoi se sentit-elle obligée de me préciser qu'elle n'avait pas si mauvais caractère ? Je n'en doutais pas, après tout, je ne la connaissais pas, je me gardai bien de tout jugement hâtif. À moins qu'elle pensait que c'était d'elle que nous rigolions ? Bien sûr, pour nous, il était évident que c'était de John qu'on se moquait, mais de son point de vue, il était possible qu'elle n'ait pas ressenti la même chose. « Oh mais, je n'ai jamais pensé le contraire. John a eu une attitude particulièrement déplacé. Si ça peut te rassurer, ce n'est pas de toi qu'on se moquait, mais de lui. » Au moins, c'était dit. « Dans le fond, il est gentil, mais c'est vrai qu'il est pas toujours très correct. Pour le coup, tu as parfaitement réagi. Même si je doute que ça éveille en lui la volonté de revoir sa technique d'approche. »

« Merci ! C'est vrai qu'elles sont chouettes ! C'est du Balmain, mais je ne sais pas si tu pourras en trouver ici. Je les ai achetés directement à Paris. Au pire, tu peux toujours jeter un œil sur leur site internet. » Je préférai ne pas lui préciser qu'il fallait mieux avoir un bon compte en banque pour pouvoir se permettre d'acheter du Balmain. Certes pour ne pas lui faire peur au cas où elle n'aurait pas les moyens, mais surtout pour ne pas mettre en valeur la fortune de ma famille. Je détestais ça.

Je souris, amusée à sa dernière question. « M'en parle pas ! » répondis-je en passant ma main libre dans mes cheveux. « J'ai jamais pris la peine d'apprendre et c'est vrai que je le regrette maintenant » disons plutôt que j'ai jamais eu besoin d'apprendre, puisqu'on avait une cuisinière et un majordome pour ça, mais c'est vrai que j'aurai dû demander à apprendre, ne serait-ce qu'un minimum... « Bien sûr, je sais faire réchauffer des trucs ou cuir des pâtes, mais bon, c'est pas de la cuisine ça ! » Je reportai brièvement mon regard sur le dos du livre « Ce bouquin à l'air pas mal pour débuter, advienne que pourra ! »

Je repensai soudain au livre que la brunette était venue chercher. « J'imagine que tu sais déjà bien cuisiner pour vouloir faire des smoothies ? » Oui parce que pour moi qui savais rien faire de mes dix doigts en cuisine, il fallait forcément avoir de très grandes compétences au préalable avant de s'atteler à ce genre de confection.

C'est vrai que ça lui faisait une jolie réputation de Marie couche toi là... Je ne sais pas ce que Miléna avait fait, ou pas fait, à la personne qui avait lancé la rumeur, mais il ou elle avait visiblement une dent contre elle. Ceci dit, la rumeur ne devait pas encore avoir fait le tour de la Heroe's vu que j'en avais pas entendu parler. Après, c'est sûr que je ne pouvais pas non plus être au courant de manière exhaustive d'absolument tous les ragots. D'autant plus que Miléna était dans une autre classe de 2e année, avec un peu de chance, il était donc probable que la rumeur n'ait effectivement pas fait le tour de toute l'Heroe's.

« Ah ça... » je fis une moue compatissante. « En tout cas, tu peux être sûre que John ira pas se vanter de s'être fait rembarrer. Sans effacer la réputation qu'on a voulu te faire, cette aventure ne l'empira pas. » C'était toujours ça de gagné, si on pouvait dire... John était pas assez stupide pour se vanter de s'être fait rembarrer, surtout par une fille à la réputation de nympho, ce n'est pas particulièrement prestigieux. Remarque, même s'il avait réussi, ça ne l'aurait pas été particulièrement non plus. Vraiment, je le comprenais pas sur ce coup-là.

Miléna rit à ma question sur les smoothies. Décidément, on peut pas dire que j'étais à mon avantage.  Heureusement que je n'étais pas du genre à me vexer et que je savais rire de moi. Et bien, si ce n'est pas compliqué, il faudra que j'essaye à l'occasion, mais pour le moment, ce n'était pas priorité. La brune m'expliqua que ses parents avaient mis un point d'honneur à ce que leur fille sache cuisiner des plats traditionnels. C'est vrai que c'est plutôt intelligent. Comme quoi, l'éducation aristocratique que j'avais reçu ne servait à rien dans la vraie vie. Et dire que certains gens rêvaient d'être noble... Si c'est pour se faire appeler Lord, mais ne rien savoir faire de ses dix doigts, je ne voyais pas l’intérêt.

« Tu as bien de la chance ! Mon père jugea préférable que j’apprenne à jouer du piano et monter à cheval. » Ne crachons pas dans la soupe, j'aimais l'équitation et j'ai appris à aimer le piano, mais apprendre ne serait-ce que les bases de la cuisine aurait été appréciable. Manifestement, Miléna eut pitié de moi et me proposa de jouer les maîtres si ça me disait. Elle se sentit même obligé, taquine, d'ajouter dans un clin d’œil que ce serait pour que je ne fasse pas fuir mes invités. Je souris, amusée. Pour la petite histoire, quand j'invitais des amis, je commandais les plats, mais c'est sûr que ça n'avait pas le charme du « fait maison ». « Et bien, si tu as de la patience à revendre et que tu n'as pas peur, pourquoi pas ! » répondis-je dans un sourire.

Je sentis mon portable vibrer dans ma poche. Je pris mon iPhone pour regarder le texto. Ah, un de mes pianistes en herbe voulait savoir s'il pouvait avoir un cours supplémentaire dans l'après-midi. Je soupirai à l'idée d'avoir mes oreilles massacrées alors qu'elles auraient dû se reposer aujourd'hui, mais malgré le fait qu'il n'avait décidément aucune prédisposition pour le piano, il montrait tant de bonne volonté que je n'osai pas lui répondre par la négative. Et puis, je n'avais rien de prévu.

« Ma foi, je vais devoir te laisser. Contente d'avoir pu parler un peu avec toi. On se voit au cours commun de Stanford demain. Passe une bonne aprem ! » Après un dernier sourire aimable, je cheminai vers la caisse pour ensuite rentrer chez moi.

HRP: