« Relâchez-moi ! »

Sa voix, rendue rauque par la colère, rebondissait avec fluidité sur les murs alentours, comme si ces derniers jouaient au jeu du plus énervant avec un adversaire enchainé, présentement. Non, en réalité, André n’était pas énervé. C’était bien pire que ça. La rage le prenait au ventre, tordant ses organes de manières incroyable, faisant pulser son cœur avec hargne. Son sang circulait à vive allure dans les canaux d’artères de son corps, faisant ressortir de sous son derme des veines gonflées au possible.

Pour la première fois depuis bien longtemps – il n’aurait même su dire si ce n’était pas l’ultime coopération voulue depuis leur « rencontre » - Fenrir s’était joint à lui pour se démener de la sorte, en lui prêtant volontiers sa force et tenter de se libérer de ce lien de métal qui le tenait captif, profondément encastré dans le mur le plus proche. Et plus il irait dessus, moins il avait l’impression d’avancer dans sa lutte pour la liberté. Il s’essoufflait vite en ne se maitrisant pas ainsi. Toute son énergie était bêtement brulée, encore plus que d’ordinaire. Enfin, si l’on peut parler ainsi du peu de force qu’il avait réussi à rassembler depuis qu’il avait ouvert les yeux dix minutes auparavant. Soit, pas des masses.
Mais qu’à cela ne tienne, il continuait sa vaine entreprise, faisant fi des faits établis qui lui assurait pourtant qu’il ne pourrait pas sortir d’ici sans aide. Sauf que le Russianov n’était pas décidé à être coopératif avec qui que ce soit. L’indépendance lui allait très bien.

Faire équipe ? Sauf pour les deals qui lui rapportaient de l’argent en contrepartie, ce n’était même pas la peine d’y songer ! Il ne voulait pas revenir sur des principes durement acquis après tout ce qu’il avait vécu, tout ce qu’il avait vu et ressentit. Tout comme il ne voulait pas s’expliquer à lui-même cette volonté de solitude alors qu’au fond, il le savait bien, ça le rongeait. Et pas seulement de par la présence de la bestiole en lui, non. C’était autre chose. Mais il ne voulait pas savoir, tout simplement.

Au dieu Nordique, cela rappelait bien des misères, cette chaine. Notamment ses millénaires passés les pattes liées au sol avec une gueule maintenu ouverte par une épée planté en travers. Tout ça parce qu’il avait la faculté de dévorer le Soleil. C’était d’une absurdité totale et pourtant, plutôt que de lui faire confiance, Odin et ses sbires l’ont malmenés ainsi sans aucun remord, l’éloignant de ses frères, de sa sœur et de son père, Loki le fourbe. Sans même qu’André ne puisse faire quoi que ce soit, un son rauque et plaintif, comme un gémissement à fendre le cœur, s’extirpa de ses entrailles, remontant le long de sa gorge. Le loup pleurait. Il ne voulait pas remettre ça, il était terrifié à cette idée de demeurer encore une fois piégé ainsi et ne plus pouvoir jamais retourner courir comme bon lui semblait. Cela lui avait tant manqué ! Pitié, par de retour à la case départ. Pas maintenant. Il ne le supporterait pas et se laisserait probablement mourir si tel était le cas.

Affaiblit, Loukas fini par s’accorder un court répit, ses genoux venant rejoindre le sol tandis que sa cage thoracique se mouvait au rythme de ses respirations profondes et lentes. Comment en était-il arrivé là ? Parler et hurler contre les murs ne le ferait pas avancer, il le savait bien ça. Mais alors, quoi ? Une vive douleur au crâne l’avait pris dès son réveil, ne lui laissant guère le luxe de s’éveiller confortablement. Et cela n’avait en rien amélioré sa condition, loin de là d’ailleurs. Pourtant, il n’avait pas cessé de rouspéter, en alternant les jets de venins en russe, en français et en anglais, les trois langues qu’il connaissait. Essayant de se masser le sommet de la tête, là d’où provenait la douleur, l’expatrié chercha vainement comment tout cela avait-il pu se produire. Il abandonna l’idée du massage dés lorsqu’une nouvelle douleur se diffusa dans son corps au moment bref ou ses phalanges atterrirent sur l’épicentre du mal.

Pour ne rien améliorer, il avait froid et la faim commençait à le prendre à l’estomac. Mais il ne devait pas y penser, quand bien même ce fut très humiliant pour lui de se retrouver nu ici en voulant recouvrer sa forme humaine, ayant rouvert les yeux en possédant quatre pattes au lieu de deux jambes. Heureusement, un vieux pan de tissu étrange trainait par là et il put l’atteindre pour l’enrouler autour de sa taille, dissimulant ainsi tout ce qui se trouvait en dessous de la ceinture, bien qu’il fût seul malgré tout. Son dos trouva appui sur le mur derrière lui et il se laissa choir définitivement sur le bitume de cet endroit fort peu avenant. Oui, décidément, même s’il ne l’admettrait probablement jamais : il avait froid, il faisait noir… il avait peur.

Alors qu’il allait de nouveau s’énerver tout seul, André fut surprit par une voix de femme qui venait de percer le presque-silence qui l’encadrait. Toujours contre le mur, il dévisageât la nouvelle arrivante d’un regard neutre, voir froid. Prenant bien acte de ses paroles, il ne put s’empêcher de rire ironiquement lorsqu’elle déclina son identité. Enfin, plus ou moins. Il laissa un rire narquois s’évader de sa gorge, encore échauffée par le récent réveil plutôt traumatisant, il fallait l’avouer. Même s’il ne l’admettrait jamais, pour cause de fierté mal placée et excessive. Son caractère de base ne demandait qu’à s’exalter. Pas de pitié. C’était une notion qu’il ne connaissait pas. Ou plutôt qu’il ne connaissait plus depuis un bon moment. Depuis le jour de la mort de sa mère, enfaite.

André ne put s’empêcher d’être un poil mauvais. Mais bon, ce n’était pas entièrement injustifié vu le traitement qu’on lui infligeait. Sentir de froid du métal de cette chaine autour de son cou ne faisait que raviver sa rage, en plus de ça. Rien de mieux pour parvenir à un cocktail explosif, dans tous les sens du terme.

« Me souvenir de toi ?... C’est marrant, mais c’est tes cheveux dont je me rappelle le plus. C’est naturel, cette couleur bizarre, là ? » Fit-il avec un air dédaigneux au possible.

Il jaugeât par la suite sa propre unité, dévoilée presque entièrement son corps d’adonis. Ah, il comprenait mieux pourquoi l’autre jeune femme rougissait. Enfin, oui et non. Elle semblait plus âgée que lui, donc il y avait un problème dans son équation, forcément. André ne pouvait s’appuyer que sur son propre vécu avec les femmes, ce qui n’allait guère chercher bien loin, qu’on se le dise franchement.

Pourtant, tant qu’à s’enfoncer un peu plus dans la taquinerie et dans le mensonge, pourquoi ne pas y aller franco ? Ce serait surement très drôle, à défaut de pouvoir le sortir de là. Quoi que… Bon, d’abord, il allait un peu continuer dans le cynisme et l’invention. Après, il aviserait peut-être.

« Quoi ? T’as jamais vu un homme torse nu peut-être ? C’est ma cicatrice qui te dérange, gamine ? C’est de là que viens la bestiole que tu as sauvagement assommé, alors ne vient pas me faire croire que tu te sens gênée maintenant, je n’y crois pas. »

Il marqua une pause dans son dialogue, histoire de pouvoir reprendre un peu plus son souffle, et reprit presque aussitôt après :

« Pauvre idiote, attaquer la population ? Je sais me maîtriser lorsque je le veux… Me voir fuir n’a pas éveillé chez toi ne serait-ce qu’un semblant de réflexion sur mes actions à venir ? Sache que je contrôle parfaitement la créature à quatre pattes parce que…

Il la regarda droit dans les yeux, la foudroyant littéralement de ses agapes verts émeraudes, et enchainât :

… Je suis une légende. »

Voilà, le mensonge était posé, il ne restait plus qu’à voir ou tout ça allait le mener, maintenant. Il savait, de par ses fouilles dans des endroits où il n’aurait jamais dû mettre les pieds, que le mot « légende » avait du poids dans certains domaines. Et bizarrement, son instinct lui soufflait qu’il pouvait faire mouche, présentement. Restait à voir quelle serait les réactions de son homologue pour le moins étrange. Peut-être qu’elle tomberait dans le panneau et le libérerait immédiatement en s’excusant platement ? Hum, c’était une possibilité. Mince, mais tout de même présente alors bon, autant y croire. Ne dis-t-on pas que l’avenir appartient à ceux qui rêve trop ?...

Bon, apparemment sa ruse n’avait pas fonctionné avec la jeune femme. Enfin, pas dans l’immédiat, mais rien ne l’empêchait de continuer à mentir, comme pour la détourner de son assurée idée. Se raclant la gorge, il laissa un vague sourire agacé lui trancher le visage avant de fermer les yeux et d’appuyer sa tête contre le mur, clairement ennuyé par son homologue féminine.

« Tu m’ennuie. » lâchât-il soudainement, après le discours de la bleutée.

Il n’avait pas franchement envi d’être coopératif si elle ne daignait pas marcher dans son petit jeu. Et avec toute la mauvaise foi dont il pouvait faire preuve, il croisa les bras sur son torse, dissimulant un peu plus son immense cicatrice avant de déclarer, les paupières toujours closes.

« Fais comme tu le sens. Si tu ne veux pas me croire je ne peux pas t’y forcer, mais franchement ça m’apporterait quoi, de mentir là-dessus ? Et puis si tu avais deux sous de jugeote, tu ne te fierais pas à l’apparence uniquement. Un Dieu ne vieillit pas, idiote.»

Il prenait le problème dans le sens inverse, en espérant que cela produirait son petit effet, cette fois. En mentant de plus belle car lui-même ignorait ce qu’il avait à l’intérieur des entrailles. Dans le cas où il se retrouverait encore contrecarré, André ne savait pas trop ce qu’il pourrait faire d’autres. Fenrir commençait à s’impatienter et si ça continuait il risquait bientôt de ne plus pouvoir répondre de ses actes, qu’ils soient conscients … ou non. D’ailleurs, il rouvrit un œil, paresseusement et contemplât l’épais bandage que portait sa semblable au bras. Ah oui, ça lui revenait, maintenant. Le loup avait essayé de s’accrocher à ce membre-ci pour ne pas tomber dans le vide. Il ricana, faisant exprès de mêler son lourd accent russe à sa prochaine phrase :

« Ahah, p’tain ça doit faire un mal de chien, pas vrai ? » dit-il en souriant de plus belle, mauvais jusqu’au bout des cils.

Ironique, en plus, lorsque l’on parlait d’une morsure de loup, mais bon, il n’était plus à ça prés désormais. Respirant plus calmement, il finit par étirer ses bras tout en émettant un petit gémissement d’aise, avant de croiser ces derniers derrière sa tête et s’y appuyé. Ses muscles roulèrent sous son derme laiteux, comme une mécanique bien huilée. A le voir comme ça, s’il n’était pas attaché au mur et dans une cave, on aurait pu croire qu’il se relaxait le plus normalement du monde. Sauf que non. Il reprit bien vite la parole, le laissant pas l’occasion à la dénommé Jena de l’interrompre. Tiens, en plus elle lui fournissait un tremplin pour son mensonge inventé de toutes pièces.

« J’pas envie de te le dire, mon nom. Si tu ne connais pas mon existence, c’est qu’il y a une raison par-delà laquelle même Strider et les autres légendes ne peuvent aller. Disons que je suis une sorte de membre fantôme. On me cache puisque mes « compétences » en effraient plus d’un, vois-tu ? Mais ça je ne pense pas que j’avais besoin de le préciser, vu comment tu as paniqué tout à l’heure… ahah. »

Bon, il jugeait le truc suffisamment gros pour que la jeune femme se perde dans ses tentatives d’éclaircissement. A voir si, maintenant, ça allait vraiment fonctionner. C’est idiot, mais elle avait l’air plus malin qu’elle ne paraissait l’être, au fond, cette abrutie à la couleur de cheveux suspecte. Loukas renifla, dédaigneux, et commençât à préparer mentalement ses prochains coups pour essayer de se sortir de là.

Il devait avouer un truc, cette gamine ne manquait pas de culot. Et de sang-froid, chose qu’il appréciait, même chez ses adversaires. Car dans la vie, on n’a rien sans rien, et parfois, il faut oser pour avancer. C’est ainsi. C’est la vie, un point c’est tout. Mais d’un autre côté, elle le faisait bien rire, et ceux par bien des aspects.

Tout d’abord, elle avait l’air d’être une timide maladive, il pouvait donc jouer là-dessus pour la déstabiliser, comme il le faisait si souvent avec ses conquêtes d’une nuit ou deux. C’était si simple de toucher une corde sensible chez les jeunes femmes, tant certaines croient encore aux princes charmants. Pour ce coup-ci, le Russianov ne pouvait que remercier les contes de fées idiots et dégoulinants de guimauve, ils rendaient la drague faussement sincère dés plus simple, dès que l’on avait une piste quant aux goûts de sa « cible ». Bref, il n’allait pas la ménager, c’était sûr. Il était enchainé, par mourant non plus. En pleine possession de ses maudits moyens, donc.

Ensuite, elle lui avait posé des conditions pour le libérer. Il laissa échapper un rire sonore, presque fou, qui se répercuta sur les murs, pour revenir vers eux en un écho malsain et intimidant. Oui, quand Loukas s’y mettait, il pouvait mettre la barre très haut. Et ce n’était pas pour lui déplaire car force est de constaté qu’il ne s’était plus amusé ainsi depuis un bon bout de temps.

Faisant craquer sa nuque et ainsi s’agiter sordidement les haines le retenant pendant un court instant, le métisse reconduisit son regard froid sur la bleutée. Donc, ses cheveux étaient naturels. Mwarf, ça lui faisait une belle jambe de savoir ça, tiens. Mettant cette information qu’il jugeait finalement inutile de côté, le jeune homme bailla puis enchaîna sur son plan de base ; à savoir déstabiliser l’adversaire.

« Dis donc, t’serais pas vierge toi ? »

Il avait lancé ça au pif, absolument pas certain de son allégation ; mais bon si au moins ça pouvait perturber son homologue, alors il n’hésitait pas une seule seconde. Ricanant encore en se remémorant les paroles précédentes de la dénommée Jena, il enchaîna presque immédiatement ;

« Et pourquoi je ferais une chose pareille ? Tu crois vraiment que tu as un moyen de pression sur moi, милочка ? »

Un frisson le parcouru légèrement tandis que son cœur rata un battement, bien qu’il n’en laisse rien paraitre. Holà, la créature s’impatientait de plus en plus, c’était mauvais, ça. Très mauvais. S’il ne la laissait pas sortir bientôt, il était certain qu’il allait devenir complétement barge, et ça, c’était absolument hors de question. Ainsi, son plan presque finement étudié en deux temps trois mouvements, André prononça encore des paroles qui se voulaient convaincantes à l’intention de la McAlpha.

« Écoutes moi bien : On peut encore régler ça comme des adultes et de manière pacifique. Vois-tu la bestiole commence à reprendre des forces et s’agiter plus que raison. Et ce n’est pas la petite chaîne à la con que j’ai présentement autour du coup qui va pouvoir l’arrêter en cas d’énervement plus poussé, tu comprends ou je veux en venir ? Donc, plutôt que de la laisser tout détruire et de faire une malheureuse victime, en l’occurrence, toi, pourquoi ne pas m’ôter ce lien qui me relis au mur comme une grande ? Crois-moi ce sera encore la chose la plus intelligente que tu auras fait aujourd’hui. »

Pour le coup, il n’avait qu’à moitié menti. Le lupin en lui s’exaltait de plus en plus et ça allait finir par devenir dangereux. Il avait déjà eu l’occasion de voir les colères dévastatrices de la bête sans pouvoir rien faire contre ça et … il ne tenait pas à remettre le couvert de sitôt, pour être franc. Les négociation étaient maintenant pleinement ouvertes, restaient à voir ou est-ce que ça le mènerait, tout ça.

Spoiler:

Bordel, mais c’est qu’elle persistait celle-là ! Ça en devenait vraiment gavant, si bien qu’André n’hésitait plus à la comparer mentalement à une espèce de sangsue, à ne pas vouloir lâcher le morceau de la sorte. Toutefois, il finissait par se demander si elle était très intelligente … ou tout le contraire. Cette petite variable pouvait mettre en péril l’entièreté de son usurpation, il se devait donc d’être très prudent. Ses prochaines paroles le feraient sans aucun doute possible marcher sur des œufs. Ingéniosité et confiance en soi étaient donc les cartes maîtresses à avoir dans sa manche, désormais.

Il l’écoutait parler, affichant volontairement une mine blasée, comme si ce qu’elle disait était stupide au plus haut point. En vérité, il ne savait rien de tout ça. Mais puisque son intuition naturelle semblait l’avoir mené sur une piste potentiellement productive, pourquoi pas finalement. Faisant craquer sa nuque de manière audible, l’expatrié soupira, d’une façon tout aussi soutenue, histoire de montrer l’ennui qui ne l’occupait en réalité pas. Il était très bon comédien, et tirait profit de tout ce qui pouvait lui tomber sous la dent, en l’occurrence les paroles de la jeune femme, qu’il pouvait détourner à loisir dans son propre intérêt. Ce ne serait pas drôle, sinon.

« Non mais tu te prends pour qui, sérieusement ? Une avocate ? Laisse-moi rire, tu ne connais même pas ton sujet, apparemment. Oui, je contrôle la bestiole... mais lorsque je suis en forme seulement, ce qui n’est pas tout à fait le cas, grâce à tes magnifiques coups de barre de fer en plein sur mon crâne ! Il profite de ma baisse de régime pour tenter une échappée, vois-tu ? »

Ça, c’était dit. Mais il ne fallait pas s’arrêter là, bien au contraire. Poser les fondations d’un mensonge neuf ça demandait peu d’effort, mais il était vital de surenchérir immédiatement si l’on ne souhaitait pas voir le travail fourni jusque-là balayé au loin comme une simple feuille par la brise naissante. Il y avait besoin de plus. Entretenir cette fourberie, du même ordre que les soins prodigués à un feu neuf et ne devant pas s’éteindre, pourrait peut-être permettre au russe de s’en sortir sans trop de dégâts. Mais il ne devait pas se relâcher immédiatement dans ce cas. Tous ses espoirs allaient se jouer maintenant.

« Puis bon, tu parles, tu parles, mais je n’ai pas l’impression que tu connaisses grand-chose de la vie dit-il, avec une mimique moqueuse contrairement à moi. J’sais pas, l’idée qu’on soit tous humains et qu’on possède des limites comme tout le monde ne t’effleure même pas l’esprit ? Personne ne peut se vanter de contrôler parfaitement son don. Même les meilleurs ont des failles, Strider pourra te le confirmer. Peu importe les années d’entrainement que l’on a derrière nous, on peut toujours être la proie d’un revirement de situation. C’est comme ça. Enfin, j’pense pas que c’est toi qui va me contredire à ce sujet, n’est-ce pas, miss catastrophe ? »

Il ne connaissait presque rien des légendes, et son allégation pouvait ne pas se défendre. Pourtant, il agissait à l’instinct, comme toujours. Et ce n’était pas prêt de changer, vu que tout semblait bien se passer jusque-là. Aller. Encore un tout petit effort et ça devrait être bon. Il fallait juste persister un peu, rien qu’un tout petit peu.

Et bordel, ça aussi, ça n’avait pas marché. Pourtant André avait usé de ton son stratège et son talent de faussaire pour rendre son mensonge crédible, mais sa nouvelle tentative avortait, tout comme ses précédentes. C’en devenait rageant, surtout lorsqu’il sentait qu’il avait raté le coche de sans doute très très peu !

Avant même qu’il puisse de nouveau en placer une, voilà que la miss catastrophe aux cheveux bleus – c’était quoi son nom, déjà ?- partait dans un longuet monologue qui promettait d’être aussi vide qu’assommant. Dis donc, c’est qu’elle ne démordait pas de ses idées, celle-là ! Bon, dans un sens, c’était un trait de caractère qui plaisait au Russianov. Enfin, en temps normal. Pas quand il était attaché comme un vulgaire animal ! En plus elle avait parlé de le laisser croupir ici jusqu’à ce qu’il se déshydrate. Ce n’était pas une bonne nouvelle car il craignait que la bête parvienne à reprendre le dessus sur lui au bout d’un moment. Il ne tenait pas à se faire remarquer davantage, pour être tout à fait honnête. En réalité il avait simplement envie qu’on lui foute la paix et rien de plus. Mais c’était grandement compromis.

Sortant de ses désastreuses pensées, il prit simplement acte du fait que la lourde porte de cet endroit lugubre ne se referme lourdement avant d’accuser le coup des dernières paroles de cette diablesse à la chevelure turquoise. Comment ça, le psy de cette espèce d’institut de fou allait venir le voir ? Pas question, même pas en rêve ! C’était le genre de personne qui fouillait volontairement dans votre tête pour en extirper les plus bas instincts sans oublier les souvenirs les plus noirs. Et ça, il était hors de question que Loukas ne l’admettre. Tant pis, il allait jouer avec le feu – enfin le loup pour s’adapter à son propre cas mais bon… - et verrait bien ou ça le mènerait. Ce n’aura pas été faute de ne pas prévenir la donzelle des risques encouru.

Il était encore incapable de dire s’il avait les ressources nécessaires pour briser cette maudite chaîne, mais il allait essayer. Ni une ni deux, son corps revêtit l’apparence de l’animal à l’immaculée fourrure et il se mit à tirer sur le lien de métal, désespérément. Il ne se laisserait pas faire et ne se rendrait pas sans avoir donné auparavant tout ce qu’il avait dans le ventre. C’était comme ça et pas autrement. Dans le même temps, il poussait d’horribles hurlements qui auraient donnés des frissons à n’importe qui. Mais c’était sans effets, bien qu’il ne se l’explique pas. Au mieux, les cris revenaient vers lui après avoir ricochés contre les murs de cette pièce sombre, lui occasionnant un nouveau mal de crâne, ce qui énerva l’animal encore plus qu’il ne l’aurait pensé.

Qu’allait-il advenir de lui, maintenant qu’il laissait intervenir le plan B, soit le relâchement total de son instinct ?...