Nue avec une boucle sur le sexe, tu ferais un joli cadeau

« Bonne fête Strider !!

Je suis ton fan numéro un ! J'ai toutes les figurines du dessin animé, tout les films et j'ai tout les articles du Minute Papillon ! qui causent de toi ou des autres légendaires. J'espère que tu vas passer une super fête. J'imagine que les super-héros doivent avoir des anniversaires super géniaux avec des mannequins à genoux devant vous pendant que vous vous saouler au champagne. La grande vie, quoi !

Désolé pour la perte de Lester et Râ. Ils étaient vraiment cool. Moins que toi mais bon.

Bye bye et bonne fête encore ! »

« Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire ! Joyeux anniversaire, Wilhelm... Joyeux anniversaire !

Hé, c'est Stephanie ! Trente-trois ans, Wilh' ! Ça veut dire que ça fait cinq ans que je suis ta styliste ! Ça me manque nos parties de jambes en l'air. Si ça te tente d'avoir du sexe en cette journée toute spéciale... tu sais où me trouver.

En plus, j'ai acheté des nouveaux jouets très intéressants... j'aimerais beaucoup les essayer avec toi. Appelle moi ! »

« Ach ! Je tombe toujours sur ton répondeur Wilhelm. Je m'ennuie de toi. Ça fait des mois que ta mère et moi on essaie de te rejoindre. J'espère que tu vas venir nous voir aujourd'hui pour ton anniversaire. Les fêtes, c'est en famille ! On a vu au journal que tu t'es encore battu contre l'extra-terrestre. On a vu aussi que tu avais été blessé, tu étais à l'hôpital. Pourquoi tu nous l'as pas dit ? Je m'inquiète pour toi. Ta mère aussi, elle fait pas ses nuits. Tu crois pas que trente-trois ans c'est assez vieux pour arrêter de jouer aux super-héros ? Passe le flambeau avant d'avoir un accident. S'il t'arrive quelque chose, on va pas s'en remettre. Appelle, viens nous voir. Tu sais voler, non ? C'est pas loin le New Jersey...

Je t'aime mon fils. »

« Bonne fête Strider ! » « Bonne fête Wilhelm ! » « Joyeux anniversaire ! »« Bonne f... ! »

Je lance le téléphone contre le pan de mur vide de la cuisine. Il éclate. Et moi je prends une gorgée de vodka. Je maudit ces imbéciles qui croient que de vieillir d'un an est un truc cool. C'est cool quand t'es un adolescent. Mais après, c'est un pas de plus vers le cercueil. Quoique contrairement à l'avis de mon père, je suis convaincu de ne jamais mourir. Crever, c'est pas pour moi. Crever, c'est pour les monsieur et madame tout le monde qui vont êtres oubliés une semaine après leur mort. Je suis Strider, je suis une putain de légende. Même si j'ai pas réussi à tuer ce salopard de Carnage, je lui ai pris une main. Et cette main, je la garde dans la cave, à coté de son œil. Des trophées de chasse. Bientôt, c'est sa tête que j'enfoncerai sur un piquet, bien à la vue au milieu de la salle. Et je la convertirai en jeu de fléchettes. Je baisse les yeux vers ma bouteille. C'est du bon alcool. Le commun des mortels ne peuvent pas se permettre de payer cent dollars pour une bouteille de vodka. Mon salaire est de vingt million par année. Je peux me le permettre. Je peux me permettre n'importe quoi. Je casse donc la bouteille dans l'évier et titube vers le salon. Il est midi. Je n'ai pas dormi de la nuit. J'ai patrouillé. Ça faisait longtemps que je n'étais pas sorti dans la rue. Je suis resté plusieurs heures à arpenter la ville jusqu'à tomber sur une bande de petits crétins qui menaçaient une fille avec des couteaux. Je leur ait donné la raclée de leur vie. Une bonne bagarre, c'est l'idéal pour célébrer son anniversaire. Boire et se battre, y'a que ça de vrai. De toute manière, je ne sais faire que ça. La preuve c'est que j'ai pas réussi à sauver tous ces gamins à l'incendie de l'école primaire. Encore moins ces centaines de pensionnaires de l'hôpital qui se sont fait carbonisés par l'extra-terrestre, par ma faute. Si Brooke et moi étions dans un autre endroit, il n'y aurait eu aucuns mort.

Je rebrousse chemin vers la cuisine et me prend une bière. Je ne suis pas saoul et ça me fait chier. Depuis que j'ai eu cette saleté de poudre verte dans le sang, je suis plus résistant à l'alcool. Et j'ai des migraines dégueulasses qui me rendent agressif. L'autre jour, j'ai frappé le chat de Brooke ou de Johan. Je sais plus trop lequel. Je lui ai donné un coup de pied et ça l'a envoyé dans la porte vitrée qui donne sur la cour. Heureusement, il n'a pas été blessé. Depuis, les animaux de la villa m'évitent. Je dois dégager une sorte d'aura de méchanceté. À cohabiter avec Carnage pendant deux semaines, j'imagine qu'on s'en tire seulement avec quelques séquelles. Mais si je suis incapable de me saouler, je vais vraiment péter une crise de nerfs. On dit que la cocaïne fait plus d'effet. Je connais plusieurs célébrités qui en prennent, je devrais essayer.

- Archimède, met de la musique.

Il connaît mes goûts. De la musique rock des années quatre-vingt retentit dans la maison. Je vais à la salle d'entraînement sans manquer de vider ma bière entre temps. J'installe un sac et tape dessus furieusement. J'imagine que le punching bag est Carnage. Ma fureur devient meurtrière et je fais éclater l'objet. Le riz qu'il contenait recouvre le plancher polit et j'en ressens une grande détresse. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive. Je suis de plus en plus violent. J'ai envie de la voir aussi. J'ai remarqué que je pense à elle presque à chaque minute, à chaque seconde. Son visage est à mon esprit, comme un mirage inaccessible. Pourtant elle est accessible. Elle vit avec moi depuis seize ans maintenant. C'est mon amie. Mais ce n'est plus ma sœur. Je ne veux plus qu'elle soit ma sœur. Je demande à Archimède où elle est. Il me répond qu'elle se trouve dans la cave, à bricoler. Quelle surprise. Un sincère sourire me fend le visage. Je jogge jusqu'à l’ascenseur et me laisse identifier par l'ordinateur de la base. En y mettant un pied je m'étire et prend une voix forte. Je m'en fiche un peu de déranger, c'est mon anniversaire et je fais ce que je veux.

- Alors, ce cadeau ? C'est mon anniversaire aujourd'hui.

Avec la fin de tous les récents évènements plus que mouvementés, on aurait pu croire, naïvement, que tout serait rentré dans l’ordre. Dark Hours avait été emprisonné. Carnage aussi. Logiquement on ne devait plus entendre jamais parler d’eux. Logiquement. C’était censé sonner comme une bonne nouvelle. Les foules s’étaient levées et avaient exulté de joie. Tout le monde reprenait enfin son souffle après cette période de trouble. Oui, tout le monde. Ou presque.

Brooke étaient toujours enfermée dans son laboratoire. Mauvaise habitude qu’elle avait reprise sitôt ses combats en extérieur terminés. Elle ne voulait plus sortir, en vrai. Peut-être était-ce la peur, peut-être était-ce autre chose mais il y avait un problème. Et ça l’empêchait de savourer pleinement la victoire nouvelle dû à son statut de Légende. C’était soulant. Vraiment. Et pourtant, dès lors qu’elle se replongeait dans le travail, rien n’était plus pareil. Ou plutôt, elle avait la douce impression que tout redevenait comme avant, telle une illusion des premiers jours. Ca, au moins, c’avait le mérite d’être reposant. Un peu.

Elle travaillait maintenant sur un petit cadre photo contenant tous les clichés photos des autres Légendes et d’elle-même, plus jeunes. Bien sûr, elle eut un pincement au cœur en revoyant certains visages qui ne faisaient, maintenant, plus partie de son quotidien. Ils étaient au nombre de trois, maintenant. C’était difficile à admettre. Mais il le fallait. Pas le choix, après tout. Elle espérait seulement que cette petite chose plairait à Wilhelm, au moins un peu. C’était son anniversaire, bientôt. Elle avait manqué d’imagination – et puis avec les diverses attaques, ses pensées n’avaient pas franchement été dirigées vers ce genre de choses – du coup, elle faisait comme elle pouvait pour se rattraper.

La veillée avait été tardive et Archimède lui avait à plusieurs reprises intimé d’aller se coucher mais elle n’avait pas pu. Ou plutôt, elle n’avait pas voulu. Certes, la fatigue commençait à se faire sentir mais Brooke savait que si elle fermait les yeux, là, tout de suite, maintenant, alors elle reverrait le visage de son frère. Et ça, c’était hors de question. Elle avait déjà renoncé à son ancien nom, donné par Lester, pour prendre celui du Klong et ainsi assurer à la population – qui avait naturellement découvert son lien avec l’Ambassadeur alien- qu’elle était certes un extra-terrestre elle aussi- sur le papier du moins – mais que jamais elle ne serait une menace pour autant. Déjà, la rousse estimait en avoir fait beaucoup. Beaucoup trop, même. Désormais, elle voulait simplement qu’on la laisse un peu en paix.

Elle ne répondait plus aux messages, qu’ils soient vocaux ou textuels. Serren avait essayé la joindre – enfin, elle supposait qu’il s’agissait de lui -, elle n’avait pas daigné répondre. D’autres aussi, vu que son portable avait vibré mais qu’elle l’avait ignoré royalement, comme s’il n’avait jamais été là. La seule interrogation qu’elle se posait était de savoir quels noms apparaîtraient sur son écran une fois qu’elle aurait l’envie de redevenir sociale. Eric avait-il essayé, lui-aussi ?

Bien évidemment, comme elle s’y était attendue, on ne l’a laissa finalement plus tranquille. La voix de Wilhelm s’inséra dans l’atelier de a klong. Archimède ne l’avait pas prévenu de sa venue. Maudite intelligence artificielle qui parfois, semblait pouvoir prédire ses faits et gestes. Même si, en effet, elle aurait bloqué l’ascenseur si elle avait été mise au courant. Elle soupira un peu puis fit tourner sa chaise de manière à se retrouver devant son camarade et allié.
« Désolée, il n’est pas encore tout à fait prêt. Cela dit, si t’es partant, je t’invite boire un verre ou tu veux, en compensation ! »

Brooke ne se doutait pas une seconde que son point de vue et celui de l’allemand pouvaient être si différents l’un de l’autre. D’ailleurs, même si on le lui avait dit, elle ne l’aurait pas cru. Pas après tout ce qu’ils avaient traversé ensemble.

Mon œil bifurque vers les courbes de mon amie. Je n'avais jamais réalisé qu'elle était aussi bien roulée, Brooke. Ah non, c'est pas vrai. À l'hôpital, quand elle était contre moi, j'ai remarqué. C'est con, ça fait quinze...seize ans qu'on se côtoie à tout les jours. Ce n'est que depuis cette journée merdique, entourés par les tubes et les malades que j'ai remarqué que mon pote n'est pas un garçon mais une femme. Une belle femme. Pas le genre qui m'attire normalement. Elle est un peu trop tom boy, elle gueule autant que moi, elle n'a aucune classe. Mais c'est pour ça que je l'aime comme amie. Qu'est-ce qui nous empêche de nous aimer d'une autre manière plus... physique? Ouf. C'est vraiment bizarre. Je ne devrais pas penser ça de Brooke. Franchement. C'est comme ma sœur. Je m'en veux un peu. Juste un peu. Après tout, je suis Strider. Le grand super-héros surpuissant que tout le monde connaît. J'ai bien le droit à quelques privilèges. Comme de coucher avec qui je veux. C'est ma fête en plus. Sauf que je vais pas toucher à mon amie si elle ne veut pas. Il y a des limites. Je ne suis pas un gros dégueulasse de violeur. Les gros dégueulasses de violeurs, c'est mon boulot de leur péter la gueule. Et puis, tout acte malveillant m'est insupportable depuis mon problème de poudre verte avec Carnage. Juste penser à commettre un acte contre la loi me donne envie de vomir. Même si c'est des conneries genre boire dans un parc. Je réalise juste que je me suis avancé vers elle. Je suis debout, elle est assise. Je me pince l'arrête du nez et ferme les yeux un moment. J'ai mal à la tête. Pourtant, je ne suis pas ivre! J'en suis sûr. C'est con. Je soupire et laisse tomber mon dos contre le comptoir de travail de Brooke.

- On devrait vider les réserves de la villa. Ça nous ferait du bien... Et puis, c'est pas Johan qui va y toucher...

Cette phrase fait apparaître devant moi les visages de Râ et de Lester. Puis c'est les traits de Elly qui se dessinent. Si Râ et Lester rigolent dans mon souvenir, Elly me regarde avec désir et amusement. Comme elle le faisait avant que nous... voilà, quoi. Je cligne plusieurs fois des yeux pour estomper cette image déchirante. J'aurais bien aimé détruire ce Dark Hours moi-même. En y pensant bien, il a fait plus de dommages chez les Légendes en trois mois que Carnage en quinze ans. C'est presque drôle. L'extra-terrestre doit se ronger les ongles de sa seule main restante en pensant à cet autre criminel qui a réussi là où il a toujours échoué. Je cherche une bouteille sur la table. Mais il n'y en a pas. C'est vrai, j'ai cassé l'autre en haut. Je retourne à Brooke. Elle est bien vivante elle. J'espère qu'elle le restera. C'est horrible, hein, de savoir que du jour au lendemain elle pourrait mourir. Je n'avais jamais connu la mortalité depuis le hérisson. Je croyais que ça n'allait plus jamais se reproduire. Et nous voilà. Seulement deux survivants des cinq légendes originaux. Bientôt, le gouvernement nous enverra deux recrues pour remplacer Lester et Râ. Comme si ils pouvaient êtres remplacés comme de vulgaires... pions. Je me rappelle la rage qui avait monté en moi en voyant Johan arriver la première fois. Je n'avais rien laissé paraître mais ça m'avait déchiré. Je suis sensé être le chef, moi. Quel genre de leader survit à ses camarades? Je n'ai vraiment pas les épaules pour ce rôle, finalement. Ça m'aura pris quinze ans pour m'en rendre compte. Oups, une boule dans mon estomac. Il faut que je me secoue.

- J'ai froid Brooke. Depuis neuf heure ce matin que je bois comme un marin mais ça commence tout juste à me réchauffer. Dès que je ferme les yeux, je les vois vivants. Je suis content de ne pas les avoir vu morts. Tout les quatre...

Moi qui voulait m'amuser. Je déteste faire dans le mélodrame. Mais c'est difficile de faire autrement quand tout ce qui se passe autour de nous et bien... c'est du drame. Je me détache du comptoir de travail et fait quelques pas vers le milieu de la pièce.

- Est-ce que ça vaut la peine qu'on continue? Qu'on forme les remplaçants de Râ et Lester? Qu'on sourit aux caméras comme avant? Il est peut-être temps d'accrocher la cape... pfft... comme si je pouvais faire ça.

Je me tourne vers Brooke. Je n'avais pas vu la tristesse sur ses traits. Ce que je suis égoïste. Je ne pense qu'à moi. Je m'approche d'elle et lui agrippe la main. Je la tire vers moi, dans l'optique de la serrer dans mes bras. Je me sens tellement idiot tout à coup. Je pensais à lui faire des avances tout à l'heure. Je dois être cinglé. Nous n'avons pas le temps ni le cœur à ce genre de conneries. Je vois bien qu'elle a besoin du réconfort d'un frère, pas d'un amant.

- Oh Brooke, je suis désolé de te parler de ça. Je suis vraiment un gros con. T'es aussi affectée que moi, sinon plus. Mon anniversaire n'a aucune importance.

Elle le regarde s’approcher, ne prononçant aucun mot, aucune parole. Au départ, elle a même un peu peur d’avoir gaffé, d’avoir dit une bêtise – bon, elle ne voyait pas en quoi non plus, mais une légère paranoïa s’était installée chez elle récemment. Il se pince l’arête du nez ; elle ne lui demande pas si ça va, en l’occurrence, non, pas vraiment. C’est triste, c’est quand même son anniversaire quoi. Il s’adosse sur le comptoir et parle de boire. Ah, encore. Bon, après tout, pourquoi pas ? Elle n’avait pas tellement envie de se mettre à l’envers mais si ça pouvait marquer positivement la soirée de son ami, pourquoi pas ? Elle secoue la tête en se rappelant que elle aussi, bientôt, elle va passer une année. Mais bref, là n’est pas la question. On s’en fiche, d’elle, ce soir, pense-t-elle. Un sourire se perche du mieux qu’elle le peut sur son visage. Elle veut répondre quelque chose de bien ,quelque chose qui rassure. Mais elle ne sait pas quoi dire. Elle ne trouve pas les mots. C’est chiant. Pire, c’est frustrant. Surtout maintenant. Elle s’est déjà senti suffisamment impuissante comme ça il y a peu pour ne pas en rajouter une couche. Le destin était prié de lui lâcher la grappe deux minutes, pour une fois.

Et puis finalement, c’est Wilhelm qui ouvre de nouveau la bouche, pour parler ‘d’eux’. Ah, oui. Le sujet qu’elle cherchait à éludé de sa tête pour le moment avec plus ou moins de succès. En vérité, elle y pensait tout le temps, non-stop. C’était d’ailleurs pour cela qu’elle portait l’une des chemises de Lester, sur le dos. Quelque part, elle voulait se raccrocher à n’importe quoi qui pouvait lui faire se souvenir qu’il avait été là, un jour et qu’il serait toujours là tant qu’elle ne l’oublierait pas. Elle frissonne. Elle ne voulait pas qu’il meurt. Ni lui ni les autres. Déjà pour le Hérisson, c’avait été un coup dur, mais là, trois d’un coup. Putain. Et tout ça à cause d’un seul foutu criminel. Heureusement qu’il est mort, elle ne le regrette pas. Bon, okay, elle a peut-être un peu foiré l’exécution, mais au moins la menace est éradiquée maintenant et quelque part, un petit souci de vengeance malsain est satisfait de ce final. Même si –trop – peu de personne voient les choses de cet œil. Elle ne comprend pas les humains, parfois. Et surtout, sont-ils si fragiles, même en tant que Légendes ? Elle aurait pensé qu’ils pourraient se défendre davantage. Il faut croire que non, que tout le monde a une faille, même eux, les « Légendes ». Quel nom pompeux maintenant qu’elle y repense.

Elle écoute attentivement les propos de son ami d’adolescence. Arrêter ? Ouai, pourquoi pas. Pour être honnête, elle y a déjà pensé en plus, toute seule, sans oser en parler aux autres. Mais maintenant, ils sont où, les autres ? Ah, oui, ils sont tous morts. Ahah. Même leur ‘baby-sitter’ n’est plus là. Des originaux, il ne reste que Strider et elle. Alors à quoi bon ? En plus, au dehors, on commence déjà à leur casser du sucre sur le dos. Ça sert à quoi de rester une icône à tout prix ? Est-ce que ça rime seulement à quelque chose, encore, tout ça ? Rester pour mieux se voir chuter, pour voir son image se casser la gueule plus qu’elle ne l’a déjà fait, n’est-ce pas une sorte de masochisme, au fond ? Bordel, elle ne voulait pas pensé à ça ce soir, ça la soule profondément. Elle se mord la lèvre, détournant un peu les yeux. Sa tristesse transparait sur ses traits. Génial, il ne manquait plus que cela à l’équation de la soirée déjà bien foireuse. Ironie. Elle doit vite trouver un moyen de redresser la barre, sinon ce sera vraiment fichu.

Seulement, là encore, Strider la prend de court – à croire qu’il a décidé de faire de cela son activité principale ce soir – en lui agrippant la main, la ramenant contre lui, soudainement. Brooke ouvre grand les yeux, en bug pendant une petite poignée de seconde. Ce n’était pas la première fois qu’elle était proche de Wil’, loin de là. Parfois, avant, il lui était même arrivé de s’endormir sur lui, devant la télé, c’est dire. Sauf que là, ce n’était pas pareil. Elle avait l’impression que ça faisait une éternité qu’ils n’avaient plus été si proches. Elle sent sa chaleur, ça lui fait du bien. De nouveau elle se mord la lèvre pour ne pas pleurer, ce n’est pas le moment. La rousse enlace un peu son camarade, fermant les paupières pour apprécier l’instant. Et puis, d’elle-même, elle se décolle, un peu plus zen.

Elle n’est pas d’accord avec ce qu’il dit.

« Non non, ça va. Ne t’en fais pas pour moi. »

Elle prend une inspiration profonde.

« Il ne faut pas qu’on s’arrête uniquement aux mauvaises choses, pas vrai ? Je suis sure qu’ils nous l’auraient tous reprochés, en plus ! »

Oui, voilà, elle commençait à se complaire dans une hypothèse dont elle ignorait si elle était avérée ou non mais pour l’heure, les choses lui convenaient ainsi et elle ne voulait pas les bouger. Pas tout de suite. Elle avait un anniversaire à fêter après tout, non ?

D’où elle vient ma dépendance à l’alcool ? Je ne sais pas exactement quand ça a commencé. Ça date de très loin, ça c'est sûr. Le pire c’est que je n’aime pas boire. Ça me détruit, je le sais. Je sais aussi que je ne suis pas la personne la plus agréable quand je suis ivre. Sauf que boire me fait complètement oublier le vide qui est en moi. Un vide que je ne nie pas. Je sais d’où il vient, même. Quand on est célèbre depuis sa jeunesse, c’est un symptôme presque obligatoire. J’ai beau sauver des gens, être une ‘’inspiration, je n’ai jamais vraiment pu choisir ce que je voudrais faire de ma vie. On a toujours eu un chemin déjà tracé pour moi. Résultat: je me saoule la gueule dès que je le peux. Je sais, ça vous détruit l’image du beau, puissant et honorable Strider. Avant, je vous dirais que c'était cool de boire. Ça me donnait une image sexy. Comme si l'alcoolisme était sexy. M'enfin. Depuis que je suis dans la trentaine, je le cache aux médias. Ça ne fait pas très sérieux de boire chaque jour. Surtout pour un super-héros. Et puis, après les médisances des journalistes sur notre manque de réaction face à Dark Hours, je ne vais pas donner une occasion de plus à ce connard d'Arthur Plume de me rabaisser. Ou de rabaisser Brooke. Parce que nous trois, avec Johan, nous sommes sur le même bateau. Un joli petit navire voguant sur un tas de merde liquide. Poétique, non ? N'empêche, c'est plutôt con de penser à du caca quand j'ai une femme super jolie dans les bras. Je dois vraiment être malade. Je prend une bouffée de son parfum, histoire d'enlever cette histoire de merde de ma tête. Ça fonctionne. Je me sens détendu tout à coup. Après tout, est-ce que ça vaut vraiment la peine de rester déprimé? J'ai l'impression que ce n'est pas ça dont nous avons besoin. Brooke se dégage un peu de moi. Juste assez pour pouvoir me parler face à face mais mes mains sont toujours sur sa taille. Je vois ça comme un signe. Si elle n'était pas du tout intéressée, elle se serait totalement dégagée. Comme elle le fait d'habitude. Nous n'avons pas la manie de nous toucher aussi longtemps. Cette accolade n'a rien d'amical je trouve. Et puis, elle a choisi un drôle de moment à l'hôpital pour m'avouer que j'ai été son premier amour. Pourtant, je n'ai pas envie de tout gâcher. Notre amitié, je veux dire. J'aime Brooke. Trop pour... ah et puis merde. Je glisse ma main droite sur son corps, vers son visage. Ma main gauche tient toujours sa hanche. Je m'approche d'elle au rythme de mes répliques, comme je le sens.

- Tu as raison, on vaut mieux que ça. Mieux qu'une beuverie aussi. Faut que je fasse attention avec la bouteille.

Je lui dégage une mèche de cheveux qui lui collait aux lèvres.

- C'est l'un de mes rares moments de lucidité. Je devrais aller voir les A.A...

J'approche mon visage du sien, doucement, et l'embrasse. Pas avec la langue. Je fais juste déposer ma bouche contre la sienne, style papillon. Pour tester. Je ne sais pas pourquoi mais ça me fait sourire. Je recule et secoue la tête. Je me trouve vraiment ridicule. Mais je ne suis pas gêné. C'est juste complètement irréel comme action. Voir que j'ai osé. J'essaie d'effacer ce sourire ridicule de mon visage. Je crois que je suis un peu saoul finalement. Les émotions se mélangent en moi à m'en donner le vertige.

- Il y a une partie de moi qui veut continuer de déprimer, de m'en vouloir, de me blâmer pour tout ce qui vient de se passer. Et une autre partie de moi qui... qui veut vivre, tu vois? Et si on essayait de retrouver un peu de bonheur? Juste une étincelle? Parce que moi, je vais craquer si on continue de...Brooke, je crois que je suis amoureux de toi. J'en suis pas à cent pour cent certain mais y'a de fortes chances que ce soit ça. J'aime mieux te le dire, comme ça pas de secret. Je te trouve très attirante et j'aimerais beaucoup t'embrasser encore.

Ah tiens, c'est sorti naturellement. En même temps, je me surprend moi-même. Je suis amoureux? Mais qu'est-ce que je raconte, moi? Comment je peux savoir si je suis amoureux quand je n'ai jamais ressenti ce sentiment en trente-deux ans d'existence. J'imagine que j'ai vraiment besoin de réconfort. Être amoureux serait sûrement un bon moyen de passer par-dessus toute cette merde qui nous entoure. Je jette un coup d’œil sur la table de travail de Brooke. Je siffle.

- C'est joli les photos. Merci. J'avais oublié tes cheveux super longs.

C’était à se demander si le karma ne se foutait pas tout simplement de sa gueule, là, tout de suite. Maintenant. Elle n’aurait même pas su dire si tout ça c’était la réalité ou juste une hallucination créée de toute pièce. Si ça se trouve, elle avait vraiment fini par s’endormir en travaillant, sans s’en rendre compte. Et tout ça n’était que le fruit de son subconscient complétement dérangé. Oui, voilà. Ça, c’aurait encore pu lui paraître crédible, si elle avait eu l’envie d’y croire au moins un peu. Au final, ce n’était même pas le cas. Toute envie était absente de son corps, elle tâchait de réfléchir, mais sans y parvenir. La moindre de ses pensées, si fragiles soit-elle, se désintégrait rien qu’en croisant le regard de Wilhelm. Pourquoi est-ce qu’il fallait que son destin s’acharne autant sur elle ? Il ne lui semblait pas avoir mérité tout ça, vraiment. Okay, elle n’était pas…. Plus un modèle pour le moment, mais est-ce que ça justifiait un acharnement comme celui-ci ? Non, non et non. Si elle n’était pas humaine, Brooke avait tout de même des sentiments. Et rien qu’avec l’intervention de Strider, à l’instant, elle ne savait plus où donner de la tête.

C’était comme un vieux poison qui refait surface au moment où on s’y attend le moins. Sérieusement, combien de fois, plus de dix ans en arrière, avait-elle espéré ce genre de réaction de la part du bleuté ? Combien de fois avait-elle été jusqu’à prier qu’il la regarde au moins un peu, autrement que comme une camarade de bataille ou ‘une bonne pote’ ? Elle ne les avait plus comptés. Et chaque fois était plus douloureuse encore que la précédente, comme une lente agonie qui lui cisaillait le cœur, l’intérieur. Oui, voilà, c’était exactement ce qu’elle avait ressenti en comprenant que quoi qu’elle fasse, l’allemand ne comprendrait pas ou elle voulait en venir, peu importait comment elle s’y prendrait avec lui. Ils n’étaient juste pas sur la même longueur d’onde sur ce terrain-là. Regrettable. Ou peut-être pas. Car en la brisant sans le savoir, en broyant ses sentiments involontairement, Wilhelm l’avait fait rencontrer Emily, ce qui, plus tard, avait débouché sur la naissance de Paige, sa fille. Les choses auraient-elles fini comme ça s’il avait répondu présent à ses avances ? Brooke ne le savait pas. Et honnêtement, elle n’avait pas envie de savoir. Car si la vie avait été chienne avec elle, tout gommer pour mieux recommencer ? Jamais. Et puis quoi encore ?

Elle secoue la tête, ne sachant pas quoi dire. D’instinct, elle se détache un peu de Strider, fais aussi un pas en arrière. Ce baiser l’a perturbé plus qu’elle ne l’aurait jamais pensé. Un frisson la gagne, bien vite dispersé par le commentaire de fin de son camarade légendaire.

« Ah, ouai, les cheveux… Je pensais les laisser pousser de nouveau… »

Et soudain elle réalise. Quelle idiote. Elle s’éloigne du sujet principal dont il est ici question. Elle ne doit pas fuir, du moins pas tout de suite. Ce serait une erreur. Il faut essayer de comprendre un peu, même si ce n’est pas évident. Non, en fait, elle n’a pas vraiment envie de s’introduire sur un terrain pareil, miné, maintenant. Trop de choses auxquelles réfléchir, elle ne sait même pas par quoi commencer. Alors elle improvise, parce que c’est ce qu’elle a toujours su faire de mieux, de toute manière.

« Wil… Ça te dérange si… si on en reparle un peu plus tard ? Je crois que rester enfermés ici n’est pas une bonne idée. »

Est-ce qu’elle parle pour elle, où pour eux deux ? La question reste entière. En plus, dans sa tête, elle a presque l’impression d’entendre une petite voix, bien vicieuse, qui aimerait bien commencer à savoir de quoi il en retourne exactement. Histoire de se fixer dans tout ce foutoir sans nom, ce bordel que sont ses relations. Et merde.

« Juste… Pourquoi maintenant ? »

Dis-moi, Wilhelm. Elle n’arrive à formuler que cette question, rien d’autre ne passe par-delà ses lèvres. C’est trop lui en demander, tout ça. Elle soupire, attrape son propre avant-bras et détourne le regard, mal à l’aise. Comme si ça ne suffisait pas en ce moment, tiens.

Je ne m’attendais pas à ce genre de réaction de la part de Brooke. Je m’attendais plutôt à… ce qu’elle se jette dans mes bras. Oui, voilà. Je me trouve carrément stupide là. Elle est mal à l’aise, ça se voit. Peut-être que je me suis vraiment fait des idées et qu’elle n’a pas du tout d’attirance pour moi. Son aveu dans le lit d’hôpital était des plus innocents et je viens de gâcher notre amitié. Oh. Je ne veux pas. Je ne veux pas encore du négatif. Ma vie ces derniers temps, ce n’est que du négatif. Je refuse de croire que Brooke est dégoûtée par mon geste. Je vais me convaincre qu’elle est simplement gênée, qu’elle ne sait pas réagir. Oui, c’est ainsi que je dois voir la situation. C’est le bon point de vue. Il faut être optimiste. Et puis, je n’ai aucune envie d’être l’amoureux pitoyable qui poursuit la fille. Je suis Strider, merde. LE Strider. Je ne vais pas commencer à me ridiculiser, à supplier. Si elle ne veut pas de moi, tant pis. Je ne vais pas pleurer. Je vais juste lui exposer la situation pour qu’elle prenne la bonne décision. Ce n’est pas n’importe qui, c’est Brooke. Je ne veux pas la froisser. Je trouve que ça tombe sous le sens qu’elle et moi soyons en couple. Tous nos fans le veulent. Les journalistes le veulent. C’est officiel pour tout le monde que nous formons le couple idéal sauf pour nous deux. Si on nous voit tellement ensemble, il doit y avoir une raison. Ça ne coûte rien d’essayer. On s’entend tellement bien en plus. Tous ces arguments, je veux les exprimer oralement, haut et fort. Après tout, Brooke me le demande. Elle me pose la question : pourquoi ? Mais tout ce que je trouve à répondre c’est…

- Euh….Il y avait une date d’expiration ?

Ouais. Prix Nobel, je sais. Je claque de la langue, agacé par mon manque de vocabulaire. J’utilise toujours l’humour pour désamorcer les situations hasardeuses. Surtout quand je ne trouve pas les mots. Mais là franchement, ce n’est pas le moment de bloquer. Je me gratte le fond de la tête en grimaçant, embêté. Je n’ai jamais eu à me justifier à une fille. Mais je n’ai jamais non plus envisagé me mettre en couple avec une. Que de nouveautés. Je fais un pas dans la direction de Brooke et prend un ton apaisant. Je tends la main pour lui toucher le bras. Je n’aime pas qu’elle se tienne les bras serrés contre elle. Elle ressemble à un petit animal blessé. Et je la connais plus forte que ça.

-Brooke, ne me dis pas que tu ne ressens rien pour moi ? Plus rien ? Quand nous étions l’un contre l’autre dans le lit d’hôpital, ça ne voulait rien dire ? Et ce regard ? Oui, celui-là. Quand je suis près de toi. Tu ne l’avais pas il y a un an. Il y a cinq mois. Quelque chose a changé entre nous deux. Et ce n’est pas pour me déplaire. Nous avons tous les deux besoin d’amour. Et nous sommes tous les deux capables de satisfaire l’autre. Pourquoi seulement traverser les épreuves ensemble, hein ? On pourrait tenter de se refaire. Même si ça foire, on s’en fout. Ça ne met pas en péril notre relation. C’est juste un genre… d’upgrade.

Je lui sépare les bras doucement mais fermement. Je la regarde pendant que je parle. J’espère qu’elle me croit, qu’elle sait que je suis sincère. Je ne suis pas un type romantique, je ne vais jamais lui offrir un lit de roses. Je suis juste moi. J’espère que si elle accepte ma proposition implicite de se mettre en couple, je deviendrai un moi heureux. Parce que j’en ai marre de boire du matin jusqu’au soir. C’est la première fois de ma vie que je considère vraiment que c’est un problème. Je crois même que c’est la première fois que ça me nuis. Si on joint nos forces, je vais arrêter. J’en suis sûr. Je m’approche encore d’elle, dans l’optique de l’embrasser une deuxième fois quand l’alarme retentit. Archimède nous apprend qu’il y a un attentat de super-terroriste dans le centre-ville. Je recule et éclate de rire.

-Ah, c’est pas vrai ! Au boulot.

J’attends pourtant sa réaction avant de monter me changer.

Elle s’était attendue à n’importe quelle réaction venant de Wilhelm. Bien qu’elle le connaisse depuis pas mal de temps maintenant, elle le savait tout de même imprévisible et capable de n’importe quoi lorsque les conditions étaient réunies. Et là, l’improbabilité des choses faisaient que rien n’était impossible ; qu’il s’agisse de lui ou même… d’elle. C’est vrai qu’elle ne s’était plus posé la question depuis longtemps mais tout ce qui s’était passé avec Carnage et Strider avait réveillé chez elle une ancienne affection qu’elle n’’estimait plus être d’actualité sur le moment. Ce n’avait été rien de plus que des petits aveux pour faire réagir Wilhelm et rien de plus, n’est-ce pas ? Et si, justement, elle se trompait sur toute la ligne ? Vu les erreurs commises récemment, ça n’aurait pas été franchement étonnant de la voir se planter une fois encore. C’était presque une coutume, chez elle, désormais. Elle étouffa un frisson.
Et puis elle ne put s’empêcher de rire sincèrement lorsque le bleuté lui répondit le plus naturellement du monde, avec des mots qui le caractérisait bien. Une date d’expiration… Qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre ! Et pourtant, c’avait réussi à la détendre un peu, même si ses bras étaient toujours croisés sous sa poitrine. Elle n’avait plus eut l’occasion de rire comme ça, de façon spontanée et non surjouée depuis un moment et c’était plaisant. Elle n’eut aucun mal à entendre le discours du « chef » des Légendes par la suite. Malgré tout, elle ne savait quoi en penser. A chaud, comme ça, elle ignorait comment se situer face à lui et face aux autres. Brooke finissait même par se demander si elle avait un jour cessé d’être amoureuse de Strider. Peut-être que non, en fin de compte. Peut-être que le reste n’avait été qu’illusion, au final. Non, elle ne devait pas dire ça. Elle avait aimé Emily plus fort qu’elle n’avait aimé Strider, c’avait été un fait indéniable. Mais maintenant qu’elle était célibataire et qu’il lui faisait une véritable proposition, était-ce mal d’avoir un petit espoir ? La rousse secoua la tête, lasse de tout ça, déjà.

Elle savait que cette relation, si tant est qu’elle venait à voir le jour, ne déplairait à personne – du moins, elle le pensait sérieusement. Ses fans et ceux de Strider les imaginaient souvent ensemble, d'ailleurs. On leur avait déjà envoyé des dessins les représentants et en vaquant sur le net, l’alien était déjà tombé sur des blogs et autres fanfictions – parfois plus ou moins bien écrites- la mettant en scène avec Wilhelm. Il n’y aurait personne pour s’opposer. Ça changerait. Peut-être même que ça donnerait lieu à un équilibre salvateur, chose qu’elle attendait depuis des mois voire des années maintenant. Pourtant il lui semblait que cette opportunité lui glissait déjà entre les doigts. Il fallait qu’elle prenne une décision et vite, elle le savait. Mais dans l’immédiat, elle ne pouvait se prononcer. Ce n’était pas qu’elle n’en avait pas encire, mais elle se sentait tout simplement incapable de mettre des mots sur ses ressentit, pour l’instant. Elle avait besoin d’y réfléchir très sérieusement à tête reposée et seule.

Elle se sent mal à l’aise alors qu’il s’approche pour l’embrasser, encore. Un frisson lui remonte la colonne vertébrale. Elle ne se dérobera pas, elle le sait. Au fond elle a envie qu’il aille au bout de sa démarche. Mais… mais voilà. Il y a aussi une partie d’elle qui souhaiterait juste s’évaporer et disparaitre loin de tout ce melting-pot de désastres dans sa vie sentimentale. Paradoxe. Elle ferme les yeux, comme si ça pouvait arranger la situation quelque part, alors que non.

« Madame, désolé de vous interrompre, mais un attentat terroriste vient d’être détecté. »

Ses paupières se rouvrent brusquement. Elle a un arrière-goût de déception sur la langue en voyant Strider qui s’éloigne pour aller se changer. Elle doit faire de même. C’est l’occasion de mettre son costume de pirate qu’elle n’a plus mit depuis… un bout de temps, maintenant. Même s’il ne cache pas son identité, cet enchevêtrement de tissu l’aide à se contenir. Finalement, c’est une bonne chose qu’ils aient été stoppés de la sorte. Ca ne servait à rien de continuer à s’acharner sur une question qui restait, pour l’heure, sans réponse.

« Bon, c’est parti. »

Elle se claque les joues et donne des instructions à Archimède qui s’exécute. La voici coiffée de son tricorne, vêtements stylisés pirate sur le dos. Grimpant sur le dos de l’un de ses raptors, elle garde ses nano-machines tout près d’elle, sa nouvelle télécommande sur le poignet. Puis elle parle dans la radio.

« Strider, séparons nous, je vais y aller par voie terrestre, ce sera plus simple si on doit les choper directement. »

Elle espère qu’elle est encore capable d’une chose pareille. Et puis, elle se sent obligée de rajouter quelque chose.

« Oh et… Wil ? Par rapport à ce que tu m’as dit… Ce serait possible qu’on en reparle un peu plus tard ? »

Elle déglutit un peu mais bon, au moins comme ça, c’est dit.