Je rajoutai une dernière couche de rouge carmin sur mes lèvres douces et charnues, et contemplai le résultat dans l'immense miroir qui se dressait dans ma chambre, une moue satisfaite se dessinant sur mon visage.
Pas mal.
Pour ne pas dire que j'étais absolument parfaite. Enfin, sous-entendu, encore plus que d'accoutumée.
Mon regard balaya l'ensemble de ma tenue, passant des délicates chaussures à talons hauts à ma robe vert bouteille qui soulignait ma silhouette sublime et mon teint presque ivoire, jusqu'à mon visage merveilleusement bien maquillé et mis en valeur par une coiffure des plus ravissantes.
J'étais fin prête pour ma soirée.
Alors que j'étais en train de baver devant mon reflet dans le miroir, on toqua à ma porte. Je m'empressai d'aller ouvrir à Amanda, une collègue qui nous avaient conviés, moi ainsi que d'autres personnes qui ne méritent pas d'être nommées, à passer la nuit dans la discothèque la plus branchée de la ville. Je ne pouvais refuser une offre pareille qui m'incitait à m'amuser à n'en plus finir.
Elle me dévisagea des pieds à la tête, et lâcha, sourcils froncés :
"Jolie tenue. Mais tu risques d'avoir froid quand tu sortiras."
J'haussai les épaules. Elle ne faisait qu'exprimer sa jalousie de ne pas réussir à m'égaler, après tout, non ?
Et puis de toute façon je faisait ce que je voulais.
Je souris de façon tout à fait hypocrite, et complimentai à mon tour sa jupe, puis précisai qu'il me semblait avoir déjà vu ma grand-mère porter la même lorsque j'étais enfant.
Son visage se crispa, et je me souvins que c'était elle qui était sensée me conduire à destination, et qu'elle était assez riche pour se payer une limousine avec chauffeur.
J'écarquillai les yeux de façon innocente, sortis de mon appartement en quatrième vitesse et m'installai dans la voiture avant qu'elle ne réagisse à mes paroles et ne me laisse plantée là.

Cinq personnes étaient déjà installées dans le spacieux véhicule. Je les saluai avec un air faussement sympathique, et les dévisageai, puis finis par conclure qu'il n'y avait personne de vraiment intéressant. Tant pis. S'ils m'ennuyaient vraiment je pourrais toujours en prendre un, l'entraîner dans une impasse sombre et non fréquentée pour finalement le décapiter. C'est toujours drôle de faire ça, et le top du top c'est que je ne suis jamais soupçonnée de quelque méfait.
Amanda finit enfin par arriver à son tour, et après m'avoir lancé un regard noir qui voulait dire "je te pardonne pour cette fois, mais ne recommence pas si tu ne veux pas que je défasse ta coiffure".
Je souris de façon candide, ce qu'elle prit pour une promesse de gentillesse et d'amabilité de ma part, et m'appuyai contre le confortable dossier en cuir.

Une dizaine de minutes plus tard, nous étions arrivés. Le videur nous laissa bien entendu tous passer, persuadé que notre (et surtout mon) physique avantageux ferait de la publicité à sa boite de nuit, et nous prîmes d'assaut une table vide.
Après moins d'une demi-heure, la moitié de ces idiots était totalement pétée à l'alcool ou à la cocaïne, et étaient soit partis vomir aux toilettes, soit en train de faire je ne sais quoi dans un coin de la salle. D'autres s'étaient éclipsés prétextant une excuse stupide, alors que ça se voyait comme un nez au milieu de la figure qu'ils étaient en train de flipper en voyant ceux qui étaient plus que bourrés, et une petite minorité, dont moi, n'avait pas bougé de notre place originelle.  
Je levai les yeux au ciel en voyant ceux qui étaient restés. Une fille tellement barriolée qu'on aurait dit un motif psychédélique, une blonde qui avait désespérément besoin d'une greffe de cerveau et un mec qui avait l'air d'avoir un balai dans le cul et qui n'avait pas encore prononcé un mot de la soirée. Waouh, que de divertissements.
J'essayai de les entraîner à la piste de danse, histoire de les voir se ridiculiser encore plus en se dandinant au rythme de la musique, mais après un gloussement de la blondasse qui n'avait rien pigé et un refus total de l'arc-en-ciel sous prétexte que ça allait faire couler son maquillage, je ne réussis qu'à entraîner le type qui fit preuve d'une incroyable soumission. Boarf, c'était mieux que rien.

Je le pris par la main ignorant l'affreuse couleur écarlate que prenait son visage, et l'entrainai au milieu de la piste, me faufilant parmi les danseurs plus ou moins expérimentés.
La musique entraînante emplissait mes oreilles, et une montée d'excitation me fit sourire jusqu'aux oreilles. J'aime bien danser. Surtout lorsque je sais que je suis regardée et admirée, haha.  
Mon corps se mouvait avec classe au rythme du son, j'essayai de pousser mon collègue a se lâcher à son tour, mais il était plus raide qu'un piquet. Et il paraissait presque hypnotisé par les fesses de la poupouffe à coté de nous.
Je serrai les dents, essayant de cacher mon énervement face à cette joyeuse petite équipe à laquelle j'étais mêlé, et décidai de m'incruster dans un autre groupe plus marrant.
Mes yeux parcourirent la salle, et croisèrent un regard.
Mes prunelles se stoppèrent inconsciemment sur celui à qui il appartenait. Je le dévisageai. Cheveux blonds. Yeux verts. Traits relativement fins. Pas trop moche. Du moins, de loin.
Il me sourit. Je souris à mon tour.
Je me tournai vers mon soit-disant partenaire de danse, qui en vérité servait de décor et lui soufflai (ou plutôt hurlai) à l'oreille :
"Regarde le blond là-bas. Celui qui boit un truc. Tu l'as déjà vu ? Tu connais son nom ?"
Nos regards se focalisèrent sur lui. Il me répondit d'un signe de tête par la négative, et se remit à contempler l'énorme arrière train de l'autre.
Tant pis.
Nos regards se recroisèrent. Je fis une de ces moues charmeuses dont j'avais le secret, et détournai la tête.
Je sentis que j'avais trouvé ma distraction pour ce soir. À voir si elle durerait assez longtemps avant que je ne me lasse.

C'est trop facile.
Un simple sourire, et voilà que le blondinet voue un culte à mon charme irrésistible. Bon, pas exactement, il m'a juste proposé une danse, mais ça ne serait tarder. Et je pourrais alors savourer mon triomphe d'une manière ou d'une autre. En le tuant par exemple. Ah, quelle excellente soirée en perspective !
Je me fais entraîner dans un coin isolé de la piste. Moi qui voulait me pavaner  devant tout le monde avec un type pas trop moche au bras, c'est loupé... Bah, au moins je suppose que nous serons tranquilles pour faire nos petites affaires tranquillement sans qu'un idiot indiscret vienne nous déranger.

Mon corps est emporté par le rythme de la musique.
Je me rapproche instinctivement   de lui jusqu'à ce que nous soyons pratiquement collés l'un à l'autre. Je laisse mon regard dériver dans le sien, et esquisse un petit sourire. Même de près, il reste un des mecs les plus potables de cette salle. Je pense avoir trouvé la coucherie... euh... la proie idéale pour cette nuit.
Je passe mes mains autour de son coup afin de synchroniser ses mouvements aux miens. Autant qu'il se calque à la véritable référence dans cette salle : moi.
Je suis actuellement si près de lui que j'hume son odeur sucrée à plein nez. J'en ai presque l'eau à la bouche. Ah, que j'ai envie de planter mes dents dans sa gorge, ici et maintenant ! Mais non, je ne peux pas. Ou plutôt je ne veux pas. Je désire m'amuser un peu avec lui préalablement.

Le DJ, surexcité derrière ses platines, enchaîne sur une nouvelle chanson.
Je me détache de Boucles-d'or avec un petit clin d'oeil.
J'hésite lors d'une petite seconde de retourner en compagnie de l'autre idiot afin de jouer à la femme fatale, mais le voyant de loin s'agiter comme un phoque, je décide de rester avec le blond.
"Ça te dérange si on prend une petite pause ?", je lui susurre à l'oreille.
Sans attendre sa réponse, et avec une petite moue charmeuse plaquée au visage, je lui prends tranquillement la main et l'entraîne à l'écart, en direction des canapés.
Je m'assois avec classe, en prenant garde de ne pas m'affaler comme j'ai l'habitude de le faire en compagnie de personnes inintéressantes, et l'invite à en faire de même d'un regard aguicheur.
D'un geste faussement désinvolte, ma main vient effleurer sa joue.
"Tu avais un cil., j'annonce de ma voix la plus candide.
Je souris. Sois à moi, mon petit.