La musique en dit tellement long sur nous même. Tu ne trouve pas ?

Et me voici âme errante dans la marée de joie et de rire d'une fête foraine qui me laisse perplexe. Les manèges à sensation ne me font guère d'effet, les sucreries m'écoeurent plus qu''autre chose. Oui, je suis blasé de tout cet amusement. Mon coeur n'a toujours pas trouvé le moyen de se rouvrir aux choses simples. Il m'arrive de partager des instants complices avec certaines personnes mais autrement, je suis complètement fermé sur un visage impassible. Je deambulais donc, tel un fantôme entre toute cette foule enjouée. J'ai rangé mon ccostume de héros dans le placard ainsi que mes outils High-Tech sous la demande capricieuse de mon fils Alister, qui juge que je ne me repose pas assez. Ce matin puisque j'ai fait la grasse matinée, il a en fils attentionné préparé mon petit déjeuné et mis mes médicaments bien en évidence pour que je pense à les prendre. Mais ne serait-ce qu'un peu, j'aurais aimé faire mon boulot. Maintenir la paix, faire en sorte que la justice soit respectée, c'est un peu comme une addiction.

Pour faire passer le temps, je me suis arrêté à un stand de tir à la carabine. Cinq ballon éclatés et c'est gagné ! Évidemment, j'ai fait mouche, je tire quasi-quotidiennement. J'ai donc eu le droit de choisir une grosse peluche. Un ours habillé en rockeur, parfait pour mon fiston. C'est donc mon gain sur l'épaule, que j'ai continué ma balade, agressé par les rythmes électro des manège à grande vitesse mêlés aux comptines des manège d'enfants qui se mélangeaient dans une symphonie grinçante. Je me suis ensuite décidé à m'acheter un panini au snack de la fête foraine. Avant de le manger, j'ai prit soin de natter mes cheveux et de les mettre derrière mon dos pour ne rien faire tomber dedans. Puis j'ai calé le creux de mon estomac, avachi dans un coin. Pas excellent. Mais bon, ça vaut ce que ça vaut. C'est sûr que ce n'est pas un mets aussi exceptionnel que des côtelettes à la Kiev ou un Bortsch. Mai rien n'égale un bon pain d'épices Viazma avec un thé Krasnodar. Ah oui, je suis nostalgique de mon pays natal. Mais Alister et moi, vivant en bons ukrainiens, parlant ukrainien entre nous et mangeant des plats le plus souvent des pays Russes.

J'allais ensuite jeter mes papier dans une poubelle non loin quand quelque chose m'interpella. Une douce mélodie, couverte par le brouhaha ambiant et qui volait dans le vent. Du violon à n'en point douter. Mon ouïe aux aguets, je poursuivit cette mélodie jusqu'à tomber sur le musicien. Un jeune homme à la tignasse rouge. Mais plus que ses cheveux, j'observais ses mains. Ses doigts dansant habilement sur le manche de son instrument, son archet venant délicatement frotter les cordes. Ce garçon est un prodige. L'air un peu joyeux et entêtant cache une dimension un peu plus mélancolique. Mais me laissant porter par ce flots de notes, j'ai joint ma voix à l'instrument. Seulement quelques vocales s'accordant avec l'air, pas de texte. Le violoniste ne sembla pas s'en offusquer, continuant à jouer. Alors que nous offrions ce mini-concert à une mini-foule arrêtée par curiosité, je sentais un genre de symbiose. Comme si nous pouvions ce que l'autre aller jouer ou chanter dans mon cas. La prestations dura quelques minutes. Une fois fini, la foule se dissipa, me laissant seul avec le jeune homme. Nos regards se croisèrent, j'esquissai un sourire puis le felicitai :

《Vous avez beaucoup de talent jeune homme, je suis impressionné.》Je poursuivis en me présentant. 《Alexeï, enchanté.》

Après, va savoir s'il va s'insurger de ma participation à son petit récital.

Musique, toi mon âme.

ft. Alexeï ♥

Absorbé par ses notes, il oubliait tout le reste, jusqu'à celui qu'il était.

En fait, il aurait aimé oublié qui il était; mais il n'en était décidément pas possible. Lâche, mais pas assez. Et là, il jouait. Pour pas changer. Ouais, il passait sa vie à jouer. Là, dans cette fête foraine; un de ces lieux dont il avait une sainte horreur. Un lieu dans lequel il aurait amener Eilis; sa défunte jumelle... Elle lui aurait offert un beau et magnifique sourire; candide mais tellement vif. Elle l'aurait traîné un peu partout, lui se serait surement plein, mais l'aurait finalement suivi dans de grands éclats de rire. Il aurait fait le pitre, et elle, comme toujours, l'aurait suivi; ils auraient vite foutu plus de bordel à eux deux que l'ensemble des manèges en marche et les gens dedans. Vous auriez été heureux, pas vrai, vous auriez vraiment été heureux. Si tu n'étais pas né monstre. Si tu ne l'avais pas tué, ta précieuse petite fleur, ta précieuse petite soeur. Ta deuxième moitié.

Certain disent qu'ils ne se sentent complets qu'en la présence de leur âme-soeur; lui ne le pensait pas. Lui ne se sentait bien qu'avec sa soeur. Même son violon ne comblait pas se manque immense qui laissait son coeur en miettes. Presque autant qu'elle sur la table d'autopsie.

Joue, joue, joue. Arrête de te faire du mal; arrête d'y penser, c'est un ordre ! Owen, qu'y peux-tu...?

Zephan. Zephan. Depuis combien de temps n'avait-il pas attendu ce prénom ? Et il savait que le jour où il l'entendrait de nouveau ne lui serait pas agréable; non, cela signifierait juste que cette nouvelle vie était cuite. C'est tout. Alors, une larme dévala sa joue laiteuse, submergé par des émotions divergentes; le plaisir de jouer, d'entendre les notes se répandre avec une puissance si délicieuse à l'oreille dans l'air, la douleur, non, la souffrance -même ceci est un faible mot...- de penser à son ange dont il avait précipitamment arraché la vie, la haine qu'il éprouvait à demeurer dans un tel endroit... Tellement de chose, ouais. Et il se laissait aller à son morceau, là, dans son coin, dans son coin de solitude et de calme; parmi ce vacarme assourdissant, ce petit endroit aussi sombre et triste que lui.

Il était seul, dans sa bulle. Ou presque. Car tout à coup, une voix se mêla à son archet; un son magnifique, et les deux s'alliant, le résultat était tout simplement à couper le souffle. Sans vouloir être prétentieux, hein; la preuve, puisque des personnes les entendirent et les entourèrent vite, les écoutant avec admiration -ou alors il avait fumé un truc pas net, et il s'en souvenait pas, en plus-. Bien sûr, toute bonne chose a une fin, et celle-ci lui parut trop rapide... Finalement, le dernier coup d'archet arriva bien trop vite, et la foule se dissipa rapidement -ce qui ne le gênait pas outre mesure, il n'appréciait guère les foules. Seul avec le chanteur, il put enfin observé à quoi ressemblait cet être à la voix aussi extraordinairement agréable; cheveux violets, longs, l'air mature et plutôt sûr de lui, calme... Ouais.

▬ Vous avez beaucoup de talent jeune homme, je suis impressionné.

Owen l'écoutait en silence sans rien dire. Il cligna des yeux.

▬ Alexeï, enchanté.

Sourire. Alexeï. Voilà donc le nom de son nouvel ami... Si si. Bah, avec une voix pareil, il avait bien l'intention de s'en faire un ami -s'il en était capable. Il déposa avec délicatesse son instrument ainsi que son archet lui tendit la main dans un geste poli et respectueux. Bah... Il se présentait aussi quoi. Tentant d'afficher un sourire -le précédent étant irréfléchi il lui était venu naturellement, mais lui, sourire, euuuuh...

▬ De même. Moi c'est Owen. Merci. Vous avez une magnifique voix.

HRP : Oui, la musique, c'est UNE violoniste, mais OSEF. QQ"

Le jeune homme affichait un fin sourire quand je l'eus complimenté. Puis, après avoir posé son instrument, il se présenta comme Owen. Charmant prénom typiquement anglophone que j'aurais très bien pu choisir pour mon fils si j'en avais eu le choix -mais Alister, c'est très beau aussi. Le rouquin rejoignit à sa présentation une main tendue et un compliment sur ma voix. Le geste, bien qu'un peu cérémonieux à mon goût, était purement amical. C'est donc sans m'en insurger ou même m'en inquiéter que je lui ai serré la main, sentant à l'intérieur de mon bras mon mécanisme cliqueter très légèrement.
Il faudrait que je songe à vérifier si tout est en ordre. Mais étant entreposé forcé, mon fiston m'à habilement subtilisé le boîtier qui me permet de communiquer avec Gaspar. Et ça me stresse de ne pas avoir cette intelligence artificielle à mes côtés (Gaspar : Global Alert System for Protection Action and Repair). Et le stress, ce n'est pas bon pour les paranoïaques de ma trempe. Pour oublier cette petite contrariété, je relevai les yeux vers Owen qui, peut-être, a senti l'ouverture métallique dans le creux de ma paume droite durant notre poignée de main. Les gens me pose souvent la question quand ils voient ma DEL ou l'ouverture de mon canon, mais ça, c'est une autre histoire.
Curieux et intéressé, je préférai lui poser des questions sur la musique.

Tu dois jouer depuis longtemps pour avoir une pareille maîtrise. Tu as quel âge ?

Comme ça, au pifomètre, je dirais seize, dix-sept ans, comme Alister. Mon fils étant lui-même un prodige en guitare je ne serais pas étonné qu'il aie à peu près le même âge. Mais les apparences sont parfois trompeuses. Et c'est probablement l'enseignement le plus dur que je peux tirer de mes vingt-huit ans d'existence. Prendre son père pour un héros alors qu'il n'est qu'un criminel. Tant en souffrir que l'on en devient complètement parano. Cette folie qui empoisonne ma vie, celle de mes proches, qui ne se dompte qu'avec des pilules et une prudence sans bornes... Je la hais.
Enfin, là n'est pas la question. La paranoïa en question ne me hurle pas de me méfier du jeune homme. Je n'ai donc aucune raison de manifester méfiance ou agressivité. Non, sûrement pas envers quelqu'un qui joue d'une si belle musique. Pas envers quelqu'un qui réussit à me rendre nostalgique. Ah, les violons des musiciens dans les bars de Kiev... Avec Sergueï... J'ai l'impression que ça remonte à des siècles. Mais pour l'instant présent, je suis avec Owen.

Si on allait faire un tour ?

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